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Les autorités reconnaissent déjà que la pollution atmosphérique est directement responsable de maladies respiratoires et cardiovasculaires. De plus en plus d’études tendent à démontrer que la pollution atmosphérique génère également d’autres types de maladies comme le diabète, qu’elle affecte le développement du système nerveux et aurait, entre autres, une incidence sur le nombre de cas d’autisme, de Parkinson et de dégénérescence cognitive. On peut s’attendre qu’au cours des prochaines années, avec le cumul d’autres études, à voir la pollution atmosphérique être officiellement identifiée comme responsable de plusieurs autres maladies.
La pollution atmosphérique maintenant reconnue comme cancérogène
Le 17 octobre 2013, l’Organisation mondiale de la Santé déclarait : « La pollution atmosphérique, une des premières causes environnementales de décès par cancer, selon le CIRC » (CIRC : Centre international de Recherche sur le Cancer). Voici un extrait du communiqué :
« Après avoir soigneusement examiné la littérature scientifique la plus récente disponible sur le sujet, les principaux experts mondiaux réunis par le Programme des Monographies du CIRC ont conclu qu’il existait des indications suffisantes permettant de dire que l’exposition à la pollution atmosphérique provoque le cancer du poumon (Groupe 1). Ils ont également noté une association positive avec un risque accru de cancer de la vessie.
Les matières particulaires, une composante majeure de la pollution de l’air extérieur, ont été évaluées séparément et ont également été classées comme cancérogènes pour l’homme (Groupe 1).
L’évaluation du CIRC a montré que le risque de cancer du poumon augmentait avec l’exposition aux matières particulaires et à la pollution de l’air. Bien que la composition de la pollution atmosphérique et les niveaux d’exposition puissent varier de façon considérable, les conclusions du Groupe de travail s’appliquent à toutes les régions du monde. » (1)
Le résumé de l’évaluation du CIRC a été publié le 24 octobre 2013, dans la revue médicale The Lancet Oncology online.(1)
La pollution de l’air au Québec, un triste bilan
L’Institut national de la santé publique du Québec évalue que la pollution atmosphérique est la cause d’environ 2 000 décès prématurés parmi la moitié de la population de la province (soit là où des données relatives aux concentrations de contaminants présents dans l’air étaient disponibles au moment de réaliser l’étude) (2). À ces mortalités, on doit ajouter des milliers d’admissions à l’hôpital, des dizaines de milliers de visites aux urgences, des centaines de milliers de visites chez le médecin et, enfin, plus de 5 millions de maladies mineures (3). Mêmes à faibles niveaux, l’exposition continue à certains contaminants a des conséquences à long terme sur le corps humain que l’on commence à peine à comprendre.
Pour ceux qui préfèrent avoir une perspective économique des dommages sur la santé des humains causés par la pollution de l’air, une étude de l’Association médicale canadienne (AMC) effectuée en 2008 estimait, si rien n’est fait, la valeur cumulative de ces dommages, de 2008 à 2031, à plus de 63 milliards de dollars pour le Québec seulement (3). Notez qu’au moment de réaliser les études mentionnées plus haut, on tenait principalement compte des effets sur le système respiratoire et que l’on commençait à considérer les effets sur le système cardiovasculaire. Alors, maintenant que l’on sait que la pollution a une incidence sur le développement de certains cancers, on doit malheureusement s’attendre à voir ce triste bilan augmenter.
Outre les dommages sur la santé, les émissions à la source de cette pollution sont aussi à l’origine du smog, des pluies acides, de la destruction de la couche d’ozone et du réchauffement planétaire. Ces problèmes environnementaux ont des impacts destructeurs majeurs sur la nature, la biodiversité et les écosystèmes. Ils ont aussi des impacts économiques négatifs très importants tant dans les secteurs de l’agriculture et de la foresterie qu’au regard de l’usure prématurée des infrastructures.
Un corridor pollué tout au long du fleuve Saint-Laurent
Il existe dans notre coin de l’Amérique du Nord un corridor où la pollution atmosphérique atteint souvent des niveaux inquiétants et qui s’étend des Grands Lacs et suit la vallée du Saint-Laurent jusqu’au-delà de la région de Québec avec même un bras allant vers le Saguenay. Tout au sud de ce corridor, proche des Grands Lacs, une partie de la pollution est attribuable aux émissions de grands centres américains, mais plus on remonte et plus cette pollution est émise ici même, au Québec.
La principale source de contaminants au Québec est clairement identifiée : les transports. Ce secteur est responsable de 62 % des émissions de contaminants au Québec contre 25 % pour les sources industrielles et 11 % pour la combustion non industrielle (4).
Modérer nos transports et réduire l’utilisation de combustibles fossiles
Si les transports constituent de loin la principale source de contaminants, c’est essentiellement parce qu’ils utilisent encore beaucoup trop largement des combustibles fossiles comme énergie motrice. Le parc de véhicules légers et le camionnage sont les principales sources de ce secteur et nécessitent des approches spécifiques et efficaces.
L’essence utilisée dans les véhicules automobiles émet principalement des oxydes d’azote (NOX) et des composés organiques volatils (COV), la combustion du diesel utilisé par le camionnage et les équipements lourds représente une source importante de particules fines (PM2,5). Ces trois contaminants sont extrêmement nocifs et, dans certaines circonstances sous l’effet des rayons solaires, se transforment en ozone troposphérique (O3) puis en smog, tous deux causant aussi d’importants dommages chez les humains et à l’environnement en général.
Quiconque souhaite réduire la pollution de l’air au Québec et limiter ses effets dévastateurs doit d’abord chercher à décarboniser le secteur des transports. Voici quelques avenues à emprunter pour réduire les émissions polluantes issues des transports :
- Augmentation importante de l’offre en transports collectifs.
- Électrification des transports collectifs.
- Programme d’inspection et d’entretien des véhicules automobiles (PIEVA).
- Bonus-malus visant la réduction de la cylindrée des véhicules.
- Soutien et encouragement envers l’utilisation de véhicules hybrides et électriques.
- Soutien et encouragement envers les transports actifs.
- Soutien et encouragement envers le covoiturage et l’autopartage.
- Développement urbain réfléchi en vue de limiter les déplacements.
- Soutien et encouragement de l’utilisation du biométhane dans l’industrie du camionnage et la machinerie lourde.
- Remplacement graduel mais rapide de l’utilisation du diésel.
Contrôler les autres sources de contaminants
Même si le secteur des transports est la principale source de contaminants et qu’une série de mesures le concernant doivent absolument être mises en place pour en limiter les effets néfastes, il est également impératif de chercher à réduire les émissions des autres principales sources.
L’utilisation de poêles à bois ne respectant pas les règles environnementales est l’une des principales causes, avec les émissions des véhicules, du smog hivernal. Le chauffage au bois avec de vieux appareils constitue la principale source de particules fines (PM2,5) au Québec (44 % du total de ces émissions) (4). Il est donc primordial de soutenir et encourager le remplacement de ces vieux poêles extrêmement polluants.
Si le secteur industriel (25 % du total des émissions de contaminants) a réussi à réduire de façon significative ses émissions au cours des dernières décennies, c’est principalement pour réduire ses coûts d’exploitation. Une réglementation stricte et évolutive sera toujours nécessaire afin de limiter au strict minimum les émissions de ce secteur en portant une attention particulière aux activités portuaires qui constituent une source importante de contaminants et de particules fines.
Ne pas se laisser ensorceler par le chant des sirènes
La réduction des émissions polluantes que l’on sait maintenant responsables de cancers, requiert la mise en œuvre d’approches efficaces et le choix de politiques cohérentes. Les mesures à adopter sont connues et déjà largement implantées avec succès dans plusieurs régions du monde.
À l’heure actuelle, le Québec se trouve à la croisée des chemins. Alors que certains souhaitent augmenter massivement l’entrée de combustibles fossiles, l’AQLPA croit que ce choix constituerait un pas irresponsable dans la direction opposée de celle qui doit être empruntée pour limiter les effets dévastateurs de la pollution atmosphérique et du réchauffement planétaire.
Il est faux de prétendre que la « santé économique » dépend obligatoirement des combustibles fossiles. Cette vision est celle de ceux qui ont un intérêt immédiat dans la filière pétrolière au détriment de la santé des gens et du maintien d’un environnement sain. En fait, le véritable avenir de nos sociétés se retrouve plutôt dans le développement d’une économie « décarbonisée ».
Développer et recourir aux énergies vertes et renouvelables telles que l’éolien, le solaire et le biométhane sont des approches porteuses de développements économiques importants et surtout cohérentes avec les mesures qui doivent êtres obligatoirement prises pour répondre aux défis environnementaux du 21e siècle.
Nous aspirons chaque jour en moyenne 12 000 litres d’air (5). À nous maintenant de nous assurer que cet air ne soit pas source de maladie et de mort, mais plutôt source de vie et de bien-être.
Claude McDonnell, Coordonnateur, activités complémentaires au PIEVA
NOTE : L’AQLPA a diffusé un communiqué tiré de cet article. Accéder au communiqué.
Références :
(1) : Communiqué de l’OMS : http://www.iarc.fr/fr/media-centre/pr/2013/pdfs/pr221_F.pdf Résumé du CIRC : The carcinogenicity of outdoor air pollution, International agency for research on Cancer – http://www.thelancet.com/journals/lanonc/article/PIIS1470-2045(13)70487-X/fulltext
(2) : Bouchard, M., Smargiassi, A. (2007). Estimation des impacts sanitaires de la pollution atmosphérique au Québec : essai d’utilisation du Air Quality Benefits Assessment Tool (AQBAT), Institut national de santé publique du Québec, 59 p. http://www.inspq.qc.ca/pdf/publications/817_ImpactsSanitairesPollutionAtmos.pdf
(3) : Association médicale canadienne (AMC), L’air qu’on respire, Le coût national des maladies attribuables à la pollution atmosphérique, 2008, 47 p. http://www.cma.ca/multimedia/CMA/Content_Images/Inside_cma/Office_Public_Health/ICAP/CMA_ICAP_sum_f.pdf
(4) : Ministère du Développement durable, de l’Environnement de la Faune et des Parcs (2011),Inventaire des émissions des principaux contaminants atmosphériques (IQÉA) au Québec en 2008 et évolution depuis 1990, Québec, Direction des politiques de la qualité de l’atmosphère, 30 p. http://www.mddefp.gouv.qc.ca/air/inventaire/rapport2008.pdf
Source: AQLPA