Dans le cadre d’une activité organisée par l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM et tenue le 5 février dernier, quatre panélistes, des acteurs de la société civile québécoise présents à la récente Conférence sur les changements climatiques de Paris COP-2, ont présenté leur bilan et leur évaluation de cette conférence dite historique.
René Audet, directeur de l’Institut hôte, Patrick Bonin de Greenpeace, Alain Brunel de l’AQLPA et Mark Purdan de l’Institut du carbone du Québec ont exposé la nature de ce grand rassemblement et identifier les points forts et les points faibles de cet évènement.
L’Accord de Paris : un pas dans la bonne direction
« Pour certains, la récente Conférence de Paris constituait la dernière chance ou, à l’inverse, allait changer le cours de l’humanité» nous fait part René Audet. Selon lui, il faut surtout retenir que ça demeure une étape marquante des négociations en cours depuis deux décennies caractérisée par une volonté commune d’être réaliste et conséquent dans la lutte aux changements climatiques. À contrario de la Conférence de Copenhague de 2009, on a porté un regard d’ensemble sur cette problématique et les 195 pays présents se sont fixés des cibles rassembleuses, telles, entre autres, le financement optimal d’un fonds d’adaptation et une reconnaissance des pays vulnérables. La communauté internationale a aussi pris conscience qu’il faut viser la cible d’un 1,5°Cde réduction des GESen lieu et placedu2°C, déjà mise en cause. Ainsi donc, une étape a été franchie mais beaucoup reste à faire.
Les points forts : des éléments porteurs pour l’avenir
Les experts invités ont par la suite dégagé les résultats les plus probants qui permettent d’envisager une suite heureuse de cette négociation. Patrick Bonin nous rappelle que « cette conférence, contrairement aux négociations laborieuses et répétées des dernières années, est marquée par la volonté de transparence et de reddition de comptes (révision aux 5 ans) en s’appuyant sur la science». Il nous indique aussi que l’objectif d’atteindre la somme de 100 milliards$/an en 2020 pour un fonds d’adaptation est réellement pris en compte, incluant la participation des U.S.A. À ce titre, la notion de pertes et dommages a été établie comme un élément de référence.
D’autre part, Mark Purdan nous dessine l’évolution des négociations depuis Kyoto (1997) et conclut que « la libéralisation, les solutions fondées d’abord sur les mécanismes de marché font place à la prise de décision par le pouvoir politique». De ce changement, on peut convenir qu’il s’agit d’un régime international qui est modulé «par la négociation se déroulant de bas vers le haut», dit-il.
Finalement, Alain Purdel nous invite à se réjouir que «chacun des pays présents s’est engagé à se fixer, dans le cadre d’une entente formelle, des cibles réalistes et à les atteindre d’ici 5 ans».
Des points faibles : des obstacles à contourner pour parvenir à une solution globale
Les panélistes constatent que la dite l’Accord de Paris représente une étape vers une solution globale et concluante. Cependant, la volonté politique affichée à cette conférence doit se concrétiser dans le temps annoncé (2020) et la direction de la trajectoire (vers de 1,5°C) devra faire rapidement consensus. A défaut, l’humanité essuiera un recul.
Alain Purdel témoigne de son insatisfaction face aux résultats obtenus à cette conférence. « On doit aller plus loin, plus vite. Sans une position zéro émission, on est devant une bombe à retardement», explique-t-il. A cet égard, l’absence d’un budget carbone et d’un prix optimal de la tonne de GES, nous conduisent à des lendemains accablants. Dans l’état actuel des choses, il faut rapidement viser la décarbonisation de notre économie.
Pour sa part, Mark Purdan, nous rappelle « que les mesures adoptées demeurent insuffisantes et que les coûts sont importants. De là, la nécessité d’une grande volonté politique couplée aux mécanismes de marché».
Finalement, Patrick Bonin reconnaît que, malgré les pas en avant de cette conférence, « l’absence de prix carbone et la révision tardive des cibles fixées (2020,2030) ralentissent le mouvement vers l’atteinte de solutions marquantes et concluantes pour l’humanité». Les outils et les moyens pour y parvenir existent mais la volonté politique n’est pas à la hauteur.
Conclusion : Le pragmatisme en sort gagnant
René Audet, animateur du panel, nous présent d’abord une courte synthèse des contributions. Par la suite, en guise de conclusion, il ajoute « À Copenhague en 2009, le climat était teinté de climato-scepticisme. À Paris, on a incliné vers le pragmatisme et la cause commune». Il convient cependant de dire que « la tendance est manifestement dans le bon sens même si les cibles à gérer se présentent toujours comme des défis. La justice climatique se fait jour», conclut-il.
Denis Plante pour GaïaPresse