Sur les trente décrets signés par Donald Trump au cours de ses cent premiers jours à la Maison Blanche, huit concernent l’environnement. Le président américain n’avait pas fait mystère de son intention de revenir sur les mesures prises par Barack Obama pour lutter contre le changement climatique. Il a tenu parole.
Certes, la majorité de ses édits n’ont pas d’effet concret immédiat, mais ils sont lourds de conséquences par le signal donné aux partisans des énergies fossiles : la « nouvelle révolution énergétique » est lancée et les agences fédérales seront moins regardantes sur le respect des réglementations.
Le dernier décret en date, pris vendredi 28 avril, concerne les forages en mer. Il ouvre la voie à l’exploitation des ressources de l’Arctique, bannie par Barack Obama.
Le secrétaire à l’intérieur est ainsi chargé de passer en revue les zones maritimes qui ont été interdites à l’exploitation d’hydrocarbures jusqu’en 2022 par l’administration précédente.
Le département du commerce devra de son côté faire un rapport dans les trois mois sur les sanctuaires marins établis par Barack Obama et George W. Bush. « Notre pays a la chance d’avoir des ressources naturelles incroyables, parmi lesquelles des réserves abondantes de gaz et de pétrole offshore », a affirmé M. Trump, déplorant que le gouvernement fédéral ait interdit « l’exploration et la production dans 94 % de ces zones ».
Mettre fin à la guerre contre charbon
Deux jours plus tôt, il s’était attaqué aux nouveaux « monuments nationaux » – ou zones protégées – créés par son prédécesseur pour préserver des régions entières de l’Ouest américain de l’exploitation minière ou immobilière.
Ce décret prévoit que le secrétaire à l’intérieur devra revoir les désignations de zones de plus de 40 000 hectares décidées par ses trois prédécesseurs en vertu de l’Antiquities Act de 1906. Selon lui, cette mise à l’abri des convoitises est une « appropriation outrancière de terres par le gouvernement fédéral ».
Le 28 mars, Donald Trump, entouré de mineurs, avait signé le décret de « promotion de l’indépendance énergétique » des Etats-Unis. Celui-ci remet en cause le Clean Power Plan de 2015 limitant les émissions de carbone des centrales électriques, conformément à la promesse électorale du candidat Trump de « mettre fin à la guerre contre charbon ».
Le président a également autorisé les pipelines Keystone XL et Dakota Access, et il a accéléré le processus d’obtention des permis de construction d’infrastructures liées aux oléoducs.
Nombreux obstacles judiciaires
L’efficacité de ces mesures reste à démontrer. Comme le constate le média américain Politico, dans un passage en revue minutieux de chacun des décrets, de nombreux obstacles judiciaires, politiques ou administratifs pourraient empêcher leur traduction rapide dans la réalité.
Les premières décisions vont « créer nombre de révisions, de rapports et de commissions », note le magazine, mais il s’agit plutôt de « communiqués de presse avec la signature du président et une recommandation à son cabinet d’examiner la question ».
Sur la question des forages dans l’Arctique, par exemple, Barack Obama s’était appuyé sur une loi de 1953 – Outer Continental Shelf Lands Act – qui donne aux présidents le pouvoir de protéger les eaux fédérales de toute exploitation d’hydrocarbures.
L’association Earthjustice fourbit déjà sa plainte : selon elle, la loi de 1953 ne spécifie pas que le chef de l’exécutif peut défaire d’un trait de plume une décision d’un prédécesseur. Il serait donc illégal d’annuler le moratoire décidé par Barack Obama sur 50 millions d’hectares dont les eaux américaines de la mer des Tchouktches (au nord du détroit de Béring) et une large partie de la mer de Beaufort (au nord de l’Alaska). La justice devra trancher.
Le pétrole coule dans le Dakota Access
De même, elle sera certainement saisie de la révocation de la désignation des nouveaux monuments fédéraux, à moins que le Congrès décide de réduire la portée de l’Antiquities Act utilisé par tous les présidents pour protéger les ressources naturelles – mais il faudrait 60 voix sur 100 au Sénat.
Le Clean Power Plan résulte d’une décision de l’EPA, l’Agence pour la protection de l’environnement. Celle-ci devra donc écrire de nouvelles règles, un processus qui comporte de nombreuses étapes légales, scientifiques et administratives.
Les écologistes comptent sur la faculté de résistance des fonctionnaires, tout en reconnaissant qu’avec un budget amputé d’un tiers – si le Congrès valide les propositions de la Maison Blanche –, l’EPA ne pourra pas s’opposer facilement à son nouveau chef, le climatosceptique Scott Pruitt.
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Source: Le Monde