Urgence climatique : planifier des villes à faible impact au Québec

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Circulation montréalaise © autoloansolution

Du point de vue de la lutte contre les changements climatiques, nos pratiques d’aménagement du territoire sont un désastre
À l’occasion de la 2e édition des Rendez-vous Collectivités viables, alors que plus de 200 décideurs et professionnels québécois sont réunis autour du thème d’une croissance urbaine à faible impact climatique, Vivre en Ville dévoile les résultats de la première étude sur le bilan carbone de 18 pôles d’activité au Québec et engage l’État, les municipalités, les institutions et les entreprises du Québec à adopter dorénavant des pratiques de planification urbaine compatibles avec une croissance à faible impact climatique. L’organisme appelle à une action collective, concertée et décisive, fondée sur les connaissances scientifiques les plus solides et les pratiques d’aménagement les mieux documentées.

Le poids de l’éparpillement

Vivre en Ville a publié hier les résultats de l’étude Le poids de l’éparpillement, qui met en évidence l’impact climatique de la localisation des emplois, des commerces et des équipements de loisirs. À partir des dernières données disponibles des enquêtes Origine-destination de Montréal, Québec, Sherbrooke, Gatineau et Trois-Rivières, l’étude montre comment les déplacements en direction de pôles périphériques et mal connectés au reste de l’agglomération émettent davantage de gaz à effet de serre que ceux à destination des centres-villes, facilement accessibles en transport en commun et à pied.
En particulier, les zones spécialisées qui n’offrent qu’une accessibilité automobile affichent un bilan carbone en transport qui s’avère désastreux par rapport à celui des centralités d’agglomération, avec des émissions par déplacement de 64% à 175% plus élevées selon les pôles et les agglomérations étudiés.
« En matière de gaz à effet de serre, les mauvais choix de localisation sont à l’urbanisation ce que les VUS sont au parc automobile », estime Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville. La localisation des entreprises et des institutions sur le modèle de l’éparpillement n’est pas soutenable à long terme et ruine les efforts tant individuels que collectifs pour réduire le bilan carbone du Québec.

 

Adopter de pratiques de planification urbaine compatibles avec une croissance à faible impact climatique

La hausse incontrôlée des émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique fait peser, sur le Québec et sur le monde, ce qui est maintenant bien plus qu’une menace. Au Québec, les transports routiers sont responsables à eux seuls de 34% des émissions. Ils sont ainsi l’objet de toutes les attentes et de toutes les craintes, du fait de l’augmentation continue de leurs émissions sous l’effet d’une croissance de la motorisation et des distances parcourues.
« Les effets de la forme urbaine sur les émissions en transport sont bien connus. Pourtant, force est de constater que nous sommes encore bien loin d’opérer le virage nécessaire dans la conception et la construction de nos milieux de vie. En matière de planification urbaine, nous agissons la plupart du temps comme si les changements climatiques étaient un mythe. Nous continuons de bâtir des bureaux et des commerces autour d’échangeurs autoroutiers, de nous étaler toujours plus loin sur les milieux naturels et les terres agricoles, de construire des quartiers sans transport en commun », déplore M. Savard.
Les villes québécoises ont donc un rôle primordial à jouer dans la lutte contre les changements climatiques, d’autant plus qu’elles devront, d’ici 2030, absorber une croissance démographique de 400 000 nouveaux ménages et la croissance économique qui lui sera liée.
« Le Québec a devant lui une chance à saisir : utiliser la croissance démographique des 15 prochaines années pour consolider le tissu urbain existant et ainsi rentabiliser les infrastructures, alléger le bilan carbone et soutenir une amélioration de la qualité de vie au quotidien. Manquer cette opportunité, c’est échouer à coup sûr à tenir nos engagements dans la lutte contre les changements climatiques. C’est aussi rater l’occasion de mieux construire nos villes, nos quartiers, nos rues et nos bâtiments, au profit de l’ensemble de la société », conclut M. Savard.

 

Sept propositions pour une planification urbaine adaptée à l’urgence climatique

Vivre en Ville appelle à :
1. Limiter la part de la croissance dirigée vers les couronnes au pourtour des régions métropolitaines. 
Le bilan carbone en transport tend à augmenter avec la distance au centre; les résidents des couronnes nord et sud de la région métropolitaine, par exemple, émettent en moyenne plus de 50% plus de gaz à effet de serre que ceux de l’Agglomération de Montréal. Un rythme de croissance moins soutenu dans les secteurs périphériques favorisera la consolidation des milieux urbanisés, tant au centre que dans les couronnes.
2. Limiter l’éparpillement des lieux d’emploi.
Le bilan carbone des parcs d’affaires et autres zones spécialisées s’avère préoccupant comparé à celui des pôles centraux regroupant une diversité d’activités : disperser les emplois pour les rapprocher de la population conduit à augmenter les distances parcourues au lieu de les réduire.
3. Déterminer des cibles précises et fermes de consolidation et de densification du tissu urbain existant.
Les milieux urbains présentent une multiplicité d’espaces à réinvestir : parcelles sous-utilisées, espaces en friche, stationnements de surface, etc. L’analyse du potentiel de consolidation et de requalification et la détermination de cibles à atteindre sont des étapes essentielles à intégrer systématiquement aux schémas d’aménagement et aux plans d’urbanisme.
4. Mettre le développement des nouvelles technologies au service d’une mobilité partagée. 
Pour optimiser les infrastructures et l’utilisation du territoire, les nouvelles technologies d’information, de communication et d’automatisation doivent être développées dans l’optique d’une réduction du nombre de véhicules en circulation et non pas d’une augmentation du kilométrage parcouru. Elles devraient également bénéficier aux autres modes de déplacement à faible impact climatique.
5. Intégrer systématiquement des mesures d’adaptation aux changements climatiques. 
Tous les projets de développement urbain, qu’il s’agisse de nouveaux quartiers ou d’opérations de densification et de requalification, doivent prévoir les infrastructures appropriées pour s’adapter aux changements climatiques et intégrer, pour réduire leurs conséquences, des mesures de verdissement, de gestion de l’eau, etc.
6. Investir massivement dans le développement de réseaux structurants de transport collectif. 
La disponibilité, à distance de marche, d’un service de transport collectif fiable, fréquent, confortable et performant s’avère essentielle pour réduire le recours systématique à la voiture. Le transport collectif est une ossature indispensable au développement d’une offre de mobilité durable qui pourra combiner divers modes actifs, collectifs et partagés.
7. Intégrer la lutte contre les changements climatiques aux documents d’aménagement et d’urbanisme. 
L’évaluation du bilan carbone des orientations et des cibles visées, ainsi que les indicateurs de suivi de leurs effets, devraient faire partie intégrante de chaque document de planification (plan métropolitain, schéma d’aménagement, plan et règlements d’urbanisme).

 

Appel à collaboration – Collectivités à faible impact climatique

Vivre en Ville est actuellement à la recherche de partenaires municipaux (municipalité, MRC, ou agglomération) pour l’élaboration de stratégies, plans ou projets de consolidation urbaine visant une réduction du bilan carbone de ces collectivités et du Québec.
Les projets visés peuvent prendre différentes formes, à toutes les étapes de réalisation d’un projet d’aménagement : encadrement d’analyses urbanistiques, élaboration de concepts d’aménagement, identification de balises de design, recherche de pratiques inspirantes, révision critique de documents de planification, identification de critères d’évaluation de projets, etc.
Source : Copticom
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