Rassemblés à la place Jean-Paul-Riopelle devant le siège social de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) à l’occasion de la 46e conférence du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), de nombreux groupes environnementaux, citoyens, syndicaux, étudiants et des représentants des peuples autochtones demandent que le deuxième plus grand fonds de pension au pays écoute la science du climat, respecte l’Accord de Paris et désinvestisse du secteur des combustibles fossiles.
Sous la bannière “#SortonsLaCaisseduCarbone”, le message des organisateurs est sans équivoque : on ne peut plus ajouter de nouvelles infrastructures d’énergies fossiles sans mettre en péril l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris, soit de limiter le réchauffement climatique nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5 °C.
Kirsten Perry Responsable à la mobilisation et au développement associatif à l’Association pour la voix étudiante au Québec (AVEQ) a dit : « En tant qu’étudiants, nous savons que les compagnies pétrolières exacerbent la dégradation du climat, aggravent même l’état précaire de l’environnement et mettent à risque les droits de l’Homme, incluant la souveraineté des peuples autochtones de par le monde. La Caisse ne peut se permettre d’être complice de cette destruction alimentée par l’industrie des combustibles fossiles et doit investir dans notre avenir.»
Important rassemblement visant à dénoncer le risque de la «bulle de carbone»
Le rassemblement à la Place Jean-Paul-Riopelle a réuni plus de 350 personnes décidées à mettre en évidence l’exposition accrue au risque d’éclatement de la «bulle de carbone» pour l’ensemble des épargnants québécois, c’est à dire la chute abrupte et définitive de la valeur des actions des compagnies d’énergies fossiles. Or, l’accroissement des investissements directs et indirects de la CDPQ en 2016 dans les secteurs de production et de transport d’énergies fossiles va à l’encontre de l’Accord de Paris et de la science du climat ; en plus d’exposer la Caisse à un risque financier majeur puisque de nombreux analyses laissent envisager un effondrement de la valeur des titres du secteur des énergies fossiles dans la prochaine décennie.
Mme Charlène Aleck Ts’simtelot, conseillère et porte-parole de la Tseil-Waututh Nation Sacred Trust Initiative, a souligné que « le pays en entier est affecté par le changement du climat, d’est en ouest. Désinvestir des mégas projets de Kinder Morgan et Énergie Est est le seul choix moral que nous puissions faire pour honorer l’héritage que nous léguons à nos petits-enfants. L’institution de la Tseil-Waututh Nation Sacred Trust Initiative œuvre pour bâtir une économie verte pour tous les canadiens.»
Pour Karel Mayrand, directeur général pour le Québec de la Fondation David Suzuki, «chaque nouvel investissement dans les énergies fossiles retarde la transition vers les énergies renouvelables, et verrouille les émissions de GES pour l’avenir, parfois pour des décennies, et accroît les risques de dérèglement dangereux et irréversible du climat.»
L’augmentation des investissements de la Caisse dans les énergies fossiles
Les organisateurs rappellent qu’en 2016, la Caisse a augmenté́ ses investissements dans le charbon, le pétrole et le gaz, les faisant passer à 16,7 milliards de dollars alors qu’au niveau de son portefeuille d’actions, la proportion dans les énergies fossiles est passée de 7% à 9,7%, une orientation qui va à l’encontre de la transition énergétique. «Une telle stratégie est risquée au plan financier en plus d’être non éthique du point de vue des générations à venir. L’argent de nos retraites ne doit pas servir à appauvrir nos enfants», a conclu monsieur Mayrand.
En mai, une analyse exhaustive des données de la CDPQ réalisée par le groupe Recycle ta Caisse confirmait une augmentation des investissements de la CDPQ dans les combustibles fossiles entre 2015 et 2016, les faisant passer à 16,7 milliards de dollars.
Sébastien Collard, porte-parole du mouvement de « Recycle ta Caisse », a éclairci ces enjeux : «Il est important de se rappeler que, parce que la CDPQ a maintenu ses investissements dans les énergies fossiles entre 2012 et 2015, elle a encaissé une perte de rendement de 7,2 milliards de dollars. La situation a continué de s’aggraver depuis. Et pendant que la Caisse déclare avoir entamé sa transition vers une économie sobre en carbone, notre analyse a montré qu’en réalité l’argent des Québécois a continué d’être utilisé pour acheter des actions de compagnies exploitant des énergies du passé. Étant plus exposé que jamais à la bulle carbone, il est du devoir des gestionnaires de régimes de retraite de mandater la Caisse de protéger le portefeuille de leurs commettants.»
«La Caisse va à l’encontre d’un vaste mouvement de désinvestissement mondial lorsqu’elle continue à financer le charbon, le pétrole des sables bitumineux et les oléoducs, incluant TransCanada, Enbridge et cela se fait au dépens des investissements dans les énergies renouvelables et les transports propres » selon Patrick Bonin, Responsable de la campagne Climat-Énergie à Greenpeace Canada. Notre Caisse doit cesser d’être l’argentier des pétrolières et des pipelines qui briment les droits des Premières Nations et sabotent les efforts climatiques».
Le rassemblement a été co-organisé par la Fondation David Suzuki, Greenpeace Canada, Recycle ta Caisse, Réalité Climatique Canada, l’Association pour la voix étudiante au Québec (AVEQ), Justice Climatique Montréal (JCM) et la Mobilisation Environnement Ahuntsic-Cartierville (MEAC), le Mouvement des Travailleuses et Travailleurs chrétiens (MTC) du Québec et le conseil d’administration de MTC de Montréal.
Par ailleurs, le comité d’organisation n’a pas failli au but de sa mission et a pris le soin de collaborer avec l’artiste vaudreuil-soulangeoise Monica Brinkman afin de réutiliser les ballons noirs en latex pour en créer une œuvre d’art qui sera affichée à la Maison du Développement Durable cet automne.
Nouveau rapport sur l’évolution du climat
Le GIEC était en session de travail à Montréal jusqu’au 10 septembre pour, entre autres, élaborer son prochain rapport spécial sur l’évolution du climat, qui paraîtra en 2018. D’ici là, les groupes espèrent voir un remaniement avisé de la part de la CDPQ.
Source : Fondation David Suzuki