La compagnie Rémabec et ses filiales doivent arrêter immédiatement toutes leurs opérations forestières menées sur le territoire de la famille Weizineau et des Atikamekwd’Opitciwan et le gouvernement du Québec doit entreprendre des discussions de bonne foi avec la communauté dans un délai de trois semaines. C’est ce qu’a décidé hier matin le juge Davis de la Cour supérieure du Québec qui ordonne la suspension des coupes forestières sur le territoire ancestral d’Opitciwan jusqu’au 15 septembre.
Cette décision fait suite à la demande d’injonction déposée le 21 août dernier par le Conseil d’Opitciwan afin de stopper une opération spéciale de récupération de 200 000 m3 de bois de chablis situé sur le territoire de l’unité de gestion Windigo-et-Gouin, une zone particulièrement sensible du territoire atikamekw et qui représente la dernière portion de forêt mature du territoire de la famille Weizineau, sans que le Conseil ait été consulté adéquatement. La suspension des travaux a été accordée afin que le gouvernement et l’entreprise mènent de véritables consultations sur l’objectif du plan spécial de coupes forestières tout en assurant une protection des zones d’intérêts de la famille.
Lacunes du gouvernement
Dans son jugement, le juge met en lumière plusieurs lacunes quant à la façon de procéder du gouvernement et met l’accent sur les inconvénients subis par les Atikamekw.
Il note dans un premier temps que l’information préalable remise au Conseil d’Opitciwan était insuffisante et n’accordait pas un délai suffisant pour permettre au Conseil d’analyser la demande et de préparer des solutions. Il stipule également que le plan de travail n’avait pas été exposé dans son entièreté, particulièrement quant à la méthode et le contexte de récolte. Il ajoute enfin que la décision avait été prise par le ministère avant même de tenter de consulter et de donner un avis, ce qui est nettement insuffisant. Enfin, le juge a cru bon de souligner que les préjudices à la culture et aux pratiques traditionnelles des Atikamekwétaient supérieurs aux inconvénients de l’entreprise qui doit arrêter les coupes et l’exploitation commerciale de la forêt.
Soulagement
« C’est un grand soulagement pour la famille Weizineau et la communauté d’Opitciwan ! Le jugement rendu ce matin démontre le bien-fondé de nos démarches visant à protéger la pérennité de nos activités traditionnelles par la préservation de la dernière portion de forêt mature du territoire de la famille Weizineau. Cette coupe a un impact grave sur les pratiques traditionnelles de la famille. Nous nous retrouvons dans une situation délicate à cause du Gouvernement du Québec qui manque une fois de plus à sa responsabilité de nous consulter adéquatement avant d’autoriser les entreprises forestières à exploiter notre territoire », a déclaré Christian Awashish, Chef du Conseil des Atikamekw d’Opitciwan.
Pour Olivier Kolmel, responsable de la campagne Forêt chez Greenpeace Canada c’est un «soulagement que la cour ait accordé cette injonction, arrêtant les opérations de Rémabec temporairement. Il reste que notre gouvernement doit prendre son devoir de consultation au sérieux avant d’accorder des autorisations de coupes forestières aux compagnies. Il n’y a eu ni consultation, ni consentement pour ces coupes au coeur du territoire des Atikamekw. C’est absolument inacceptable. Pour un pays signataire de la Déclaration des Nations Unis sur les droits autochtones, il est d’autant plus important de respecter le consentement préalable, libre et éclairé lorsqu’on discute de communautés autochtones.»
« La protection du territoire pour le maintien des activités ancestrales de la famille Weizineau est absolument nécessaire. Les coupes forestières qui causent la destruction de l’habitat du gibier et des autres sites d’intérêts sont néfastes et causent des dommages irréversibles à notre culture. La sauvegarde d’un minimum de territoire est essentielle non seulement pour la famille, mais également pour l’Atikamekw en nous, notre âme et la relation que nous entretenons avec le territoire. C’est notre mode de vie et nos valeurs qui sont en jeu. L’industrie forestière et le gouvernement du Québec n’ont aucunement conscience de ces aspects. » a conclu le Chef Awashish.
Source : Conseil des Atikamekwd’Opitciwan et Greenpeace Canada