Hier les provinces et territoires du Canada ont raté une échéance importante pour la protection de l’habitat menacé du caribou boréal. Les gouvernements disposaient de cinq ans pour mettre sur pied des programmes de protection de l’habitat en vertu de la Loi canadienne sur les espèces en péril, mais à l’heure de ce communiqué, aucun plan n’avait encore été publié.
Face au silence officiel, un vaste éventail de citoyens et organismes – un représentant des peuples autochtones, un biologiste de la conservation, un ancien député du nord de l’Ontario et biologiste expert du caribou, ainsi que des groupes environnementaux nationaux et internationaux ont exigé aujourd’hui l’adoption de mesures provisoires immédiates afin d’assurer la survie à terme du caribou boréal.
« L’inaction des provinces et l’absence de plans d’action concrets et fondés sur la science qui en découle sont désastreuses pour le caribou, et une honte pour le Canada », a déclaré Rachel Plotkin, Cheffe de projets scientifiques pour l’Ontario à la Fondation David Suzuki. « Les gouvernements fédéral et provinciaux doivent absolument faire preuve de leadership et prendre les mesures nécessaires pour renverser la tendance du déclin du caribou, c’est-à-dire conserver et restaurer l’habitat dont dépend la survie de l’espèce. »
« Plus de 80 % de l’habitat du caribou boréal en Colombie-Britannique se trouve sur le territoire de la Première Nation de Fort Nelson. Cette communauté a à cœur de contribuer au rétablissement des populations de caribou », a affirmé Katherine Capot-Blanc, responsable intérimaire au Fort Nelson First Nation Lands Department. « Depuis 2011, nous tentons périodiquement d’engager le dialogue avec le gouvernement au sujet de notre préoccupation à l’égard des populations de caribou boréal, mais nous n’avons à ce jour reçu aucune réponse vraiment. Nous souhaitons être proactifs et collaborer avec le gouvernement, mais celui-ci n’est pas très réceptif. Voilà pourquoi nous avons décidé de prendre les choses en main et de créer notre propre plan d’action. »
Les principes de la DNUDPA
« C’est assez, ces échecs continus des gouvernements. Nous exigeons qu’ils respectent les principes de la DNUDPA appelant à la participation des peuples autochtones », a déclaré Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador. « Les peuples autochtones ont toujours eu une relation étroite et sacrée avec le caribou. Toute stratégie liée à la conservation des espèces doit définitivement inclure nos peuples et leurs connaissances traditionnelles, et les gouvernements devront en tenir compte dans leurs réponses. »
« En qualité d’ancien député du nord de l’Ontario et de biologiste expert du caribou, j’ai pu constater la fausse dichotomie opposant le caribou à l’emploi », a ajouté Bruce Hyer, ancien député de Thunder Bay, homme d’affaires et biologiste expert du caribou. « Je suis très déçu du manque de leadership des gouvernements fédéral et provinciaux en matière de conservation du caribou. Je suis convaincu qu’il est possible de conserver le caribou et d’assurer la prospérité de notre province en mettant en place des politiques fondées sur la science, appliquées dans un esprit de saine collaboration et de compromis. »
« Le déclin du caribou forestier est un long et terrible décrescendo, et dont on fait peu de cas », a dit Jim Schaefer, professeur de biologie à l’Université Trent. « Mais la science est catégorique : si nous conservons la forêt boréale, son habitat, nous pourrons conserver l’espèce. »
Anthony Swift, directeur pour le Canada du Natural Resources Defense Council, a commenté comme suit les impacts internationaux de l’inaction du Canada : « Le Canada ternit sa propre réputation de produits forestiers durables en négligeant de protéger l’habitat du caribou. Les provinces sont restées les bras croisés? C’est donc au premier ministre Trudeau d’agir pour protéger l’une des dernières grandes forêts de la planète et, avec elle, certaines des espèces les plus emblématiques de l’Amérique du Nord et le mode de vie de centaines de communautés autochtones. »
Le programme fédéral de rétablissement du caribou boréal publié en 2012 précisait que 37 des 51 hardes de caribou boréal au Canada étaient alors considérées « non autosuffisantes ». En l’absence d’intervention, les scientifiques de la faune prédisent que la population diminuera encore davantage au cours des 15 prochaines années, et pourrait perdre jusqu’à 30 pour cent d’individus.
L’éventail des voix qui s’élèvent aujourd’hui pour réclamer une action dit l’urgence pour les leaders politiques du Canada d’adopter rapidement des mesures de protection de cette espèce emblématique.
Source : Fondation David Suzuki