L'éducation environnementale, histoire de "vivre ensemble sur la Terre"

0

Par Edouard Sigward

 
L’actualité montréalaise de cette semaine a été marquée par la tenue du 5ème Congrès mondial de l’éducation relative à l’environnement. Au programme, des centaines de professionnels venus des cinq continents afin d’échanger et de définir, encore un peu mieux, les contours de l’éducation relative à l’environnement (ERE). Le Congrès avait pour objectif d’apporter des éléments de réponses aux trois problématiques suivantes :
  • Comment l’ERE peut-elle enrichir le sens de nos vies?
  • Comment l’ERE peut-elle contribuer à l’innovation sociale?
  • Comment l’ERE peut-elle contribuer à l’innovation politique, et influencer les politiques publiques?
L’éducation, dans l’acception générale du terme, fait référence aux différents processus qui amènent les individus qui composent une société donnée, à acquérir et à intégrer des connaissances, des langages et techniques de communication, des règles ou encore, un sens moral particulier. L’enseignement s’inscrit dans cette démarche éducative. Centrée sur la thématique environnementale, l’ERE contribue à développer de nouveaux outils de pensée, en permettant aux individus de se bâtir une identité fondée sur une vision solidaire respectueuse de tous les êtres vivants qui composent le milieu dans lequel ils évoluent. Dans ce sens, il semble tout naturel que l’ERE s’allie à l’éducation civique et à l’attirail de droits et de devoirs, qui s’associent à notre statut de « citoyen du monde ».


L’ERE a pour simple quête celle du bonheur, de la diversité, de la vérité, de la transparence… Les bienfaits « du grand air » sur l’esprit humain ne sont plus à démontrer. Selon une étude proposée par Stephanie Westlund de l’Université du Manitoba, la nature peut jouer un rôle positif dans le règlement de certains conflits, comme cela a été le cas en 1993, lorsque les délégations palestinienne et israélienne se sont retrouvées pour discuter d la paix au beau milieu de la campagne norvégienne, pour en arriver à un consensus.  


L’innovation sociale est un autre des nombreux apports de l’ERE. Les intervenants au Congrès ont d’ailleurs tenu à préciser, chacun dans leurs mots et avec une sensibilité propre à leur culture d’attache, que l’ERE doit d’être présentée dans les écoles d’aujourd’hui et de demain comme une thématique nécessaire et incontournable. Dans cette perspective, elle doit s’intégrer aux programmes scolaires, non pas comme une discipline annexe, mais bel et bien comme une matière connexe aux autres, afin de venir enrichir les programmes déjà en place en leur insufflant des valeurs d’équité, de justice sociale, de réflexion et de réflectivité. L’ERE permettrait dans ce sens de faire tomber les barrières entre des disciplines scolaires souvent appréhendées de manière hermétique, afin de modifier les rapports aux savoirs. En favorisant une plus grande perméabilité, l’ERE ambitionne de renforcer la capacité de travailler en interdisciplinarité et de traduire l’apprentissage scolaire en engagement durable. Si elle se heurte parfois à la résistance de la bureaucratie, les étudiants sont ceux qui ont le pouvoir, la légitimité et la force de porter « la quête de la durabilité » au sein de leurs établissements… quitte à ce que cela s’apparente à de l’activisme étudiant.


Une des questions qui a souvent été discutée lors du Congrès est l’intégration de l’environnement dans les programmes, la manière dont l’intérêt des étudiants pour la cause environnementale doit être récompensé et la manière dont il devrait être crédité dans le cheminement universitaire. De nombreuses niches thématiques se sont tenues, sur des sujets aussi variés que la santé environnementale, les relations entre l’écologie et l’économie, les défis du monde urbain, le rôle de l’art dans le développement d’une culture de l’environnement, ou encore la formation d‘éco-citoyens au sein des établissements scolaires. À cet effet, on peut citer l’exemple de la Florida Gulf Coast university, dont les étudiants et certains membres du personnel se sont mobilisés pour pousser leur campus à se questionner sur son empreinte écologique et à repenser ses systèmes d’approvisionnement, la provenance de la nourriture servie, la surconsommation d’eau et d’électricité. Le tout grâce à des alternatives telles que l’agriculture biologique, le passage au biodiesel pour les véhicules d’entretien, l’utilisation d’éclairage moins énergivores…
Robert Litzler, président de l’Association québécoise pour la promotion de l’éducation relative à l’environnement (AQPERE) et trésorier pour le réseau francophone des acteurs de l’éducation relative à l’environnement (PLANET’ERE), a d’ailleurs précisé, lors du discours de clôture que « nous avons le devoir d’interpeller les ministres de l’éducation partout à travers le monde ».


Pour se faire entendre et résonner dans toutes les sphères de la société, la place de l’ERE dans les débats politiques est essentielle. Les pouvoirs publics de nos pays industrialisés semblent de plus en plus conscients des enjeux environnementaux auxquels nous devons absolument apporter des réponses. Toutefois, force est de constater que ceux-ci peinent à intégrer la démarche durable. L’ERE peut aussi soutenir de nouveaux types de gouvernance, prêts à laisser place aux identités locales et capables d’engager dialogues, débats et critiques, notamment à l’égard de ce que nous entendons par développement et croissance. Si nos institutions développent davantage de modèles de succès en soutenant les initiatives et en favorisant le développement de projets, l’ERE se verra renforcée et pourra pleinement trouver sa place dans la société de demain en se positionnant comme un outil capable de sensibiliser, de responsabiliser et d’entraîner l’action. L’idée, réaffirmée lors du discours de clôture, est que « lorsque l’éducation relative à l’environnement encadre l’action de la société civile, celle-ci peut devenir un puissant levier pour influencer les politiques publiques ».


Pour Madame Elisabeth Wood, professeure en philosophie de l’éducation à l’Université McGill, « le développement d’une conscience environnementale à travers l’éducation est essentiel. Il faut être un bon apprenti pour espérer un jour devenir un bon enseignant ».  


Le challenge de l’ERE n’est donc pas tant de fournir une réponse à l’inquiétante question : « comment sauver la planète ?», que de présenter les moyens de devenir socialement actif au sein de nos communautés et d’embrasser pleinement notre citoyenneté mondiale.



Pour en savoir plus,  consultez le site officiel du Congrès qui mettra très prochainement en ligne les résultats de la réflexion de chacune des douze niches thématiques.

 

Partager.

Répondre