Le Rapport Pronovost sur l'agriculture : Prière de ne pas tabletter S.V.P., la soupe est chaude…

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Par Anny Schneider


 


Le Rapport Pronovost, dévoilé le 12 février dernier, est le résultat de la réflexion de milliers d’agriculteurs, de transformateurs et de consommateurs québécois. Sa publication a soulevé de nombreux commentaires passionnés et divergents.



Un consensus : il faut que ça change!


Au départ, tout le monde s’est mis d’accord sur au moins un point : il faut que les choses changent en profondeur, sinon l’agriculture québécoise s’en va droit vers un précipice.


Sachons nous remémorer que seul 2% de tout le territoire québécois est consacré à l’agriculture et que près de 1000 fermes familiales disparaissent chaque année. Face à ce constat,  on peut se demander qui, demain, se chargera de produire la nourriture de notre bon peuple?

Heureusement, comme souvent, les réponses sont justes à côté des questions et les vrais amoureux de la terre y ont répondu sans peine, étant confrontés depuis longtemps aux mêmes aberrations. La première réponse est bien sûr dans la nécessité de briser le monopole absolu d’un syndicat unique, imposé de force par une puissante élite de la vieille garde, car de tous les  exploitants agricoles, actuellement 94% des agriculteurs sont membres (obligatoires) de l’UPA. Les autres sont des resquilleurs ou alors des membres de l’Union Paysanne, association qui prône depuis longtemps la liberté de choix et le pluralisme syndical, comme dans la plupart des pays civilisés de la planète.

Le rapport Pronovost recommande aussi l’étiquetage individuel des produits OGM, qui sont déjà boycottés en Europe. Greenpeace Canada applaudit le rapport, bien sûr ! Mais, il avait pris les devants et il fournit déjà la liste des aliments contenant des OGM dans une brochure que vous pouvez obtenir gratuitement ou télécharger de son site internet. (cliquez ici)
 
Briser les monopoles et  les vieilles structures caduques


Le fait que ce soient seulement 20% des entreprises agricoles, souvent les plus grosses, qui ramassent 80% des subventions, est une aberration, surtout quand celles-ci sont destinées à l’élevage du porc ou à la culture du maïs, de plus en plus en plus déficitaires. Pire, ils comptent parmi les premiers facteurs de pollution du sol et surtout de notre eau douce, ressource pourtant vitale.

Voici un exemple de l’absurdité des choix des «agro industrieux» de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), des  comptables à courte vue : un jeune artisan-pâtissier local (qui fait d’ailleurs des gâteaux délicieux Mmm!), me disait que la farine venait d’augmenter de 20% car des grands producteurs céréaliers de l’Ouest avaient choisi de convertir leurs terres pour du maïs éthanol, subventionné et d’office plus payant. Du coup, on importe le blé d’Australie, avec l’augmentation évidente, due à la loi du marché et aux coûts de transport, en outre très polluants, vu la distance parcourue…



Solutions évidentes


Une autre recommandation qui a suscité bien des espoirs est celle de la nécessité de la diversification de la production en vue de l’autonomie alimentaire. Quand, au Québec, produirons-nous l’essentiel de ce que nous consommons? Commençons au moins par remplir nos besoins de base en céréales, graines oléagineuses, légumes d’hiver et petits fruits, sans oublier nos produits laitiers, en brisant l’absurde loi des quotas qui ne remplit plus sa mission première de nous nourrir à bas prix et d’assurer la relève agricole. Celle-ci force actuellement nombre de fermiers à jeter leurs surplus  de lait dans le « dallo », plutôt que d’en faire de bons fromages tout frais vendus à la porte? Préférons–nous acheter à rabais des crèmes glacées hyper sucrées faites de substances laitières modifiées made in USA? Puisse cette idée inspirer le nouveau président de l’UPA, Christian Lacasse, producteur laitier, après la chute de l’éleveur porcin Laurent Pèlerin, un autre signal rafraîchissant.

Les écologistes en général, l’Union Paysanne évidemment, mais aussi Solidarité Rurale et à sa tête Jacques Proulx, ancien président de l’UPA, devenu sage avec l’expérience, tous préconisent  l’application des pratiques de la culture biologique pour maintenir la santé de la terre et de ses habitants, dans une optique de réel développement durable.


Penser à long terme, local et global

Une autre idée intéressante élaborée dans cette étude, d’ailleurs comme dans le récent rapport sur la forêt, serait de régionaliser la gestion de  l’agriculture, parallèlement à celle de l’eau, si vitale pour ce domaine. Actuellement en Haute-Yamaska, notre préfet et les maires en sont bien conscients, le compostage généralisé étant une autre avenue pour mieux fertiliser le sol sans polluer et même de diversifier la production de fruits et  légumes locaux, par exemple. Ainsi, de donner plus de pouvoir décisionnel aux MRC, d’encourager et d’outiller mieux nos jeunes agriculteurs–novateurs, tout en assurant la santé du sol (et des individus) et la pérennité du métier, voilà une autre bonne idée coulant de source, puisque tout est relié dans la chaîne agro-alimentaire, écologique  et humaine.


Alors, le fameux : « Produire, acheter et consommer local », claironné partout sera vraiment une réalité tangible. Pour cela, tout le monde doit s’y mettre, y compris les épiciers-détaillants et même les transformateurs, qui devront accepter de diminuer leurs volumes et marges de profit pour offrir une qualité supérieure : plus locale, fraîche, vivante et variée. Sinon, il faudrait aussi plus d’ouverture aux marchés publics hebdomadaires saisonniers, voire virtuels, comme cela se fait déjà. Nul doute que les consommateurs suivront et répondront bientôt encore plus et mieux.

Prière de ne  pas tabletter S.V.P., car la soupe est chaude…
Mon ultime souhait d’écologiste et conseillère en produits de santé naturels? Que ce rapport  étoffé, un juste reflet des urgences en matière agricole, soit vraiment lu, entendu et appliqué dans des délais raisonnables. Si cela se fait, ce sera un pas important pour une meilleure santé pour le Québec, sa terre et ses habitants, car comme le dit si bien le grand gastronome philosophe Brillat-Savarin : « La destinée des nations dépend de leur (agri?) culture et de la manière dont elles se nourrissent ».

 


Par Anny Schneider

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