Par Denise Proulx
Mots-clés : Île Charron, Ministère des Transports du Québec, Parc national des Iles-de-Boucherville, Coalition pour la protection de l’île Charron, Forum Urba 2015.
Une étude menée par le Forum Urba 2015 de l’UQAM, pour le compte de la coalition pour la protection de l’île Charron, recommande au Ministère des Transports du Québec de prendre en compte tous les coûts cachés du développement éventuel d’un projet domiciliaire proposé par la firme Investissement Luc Poirier. Mieux, les membres de la Coalition militent en faveur de l’achat de l’île « à un prix raisonnable » pour l’inclure au sein du Parc national des Îles-de-Boucherville. « Plusieurs arguments militent en faveur de la conservation de cette île et nous avons voulu les soumettre au ministère du Transport du Québec (MTQ) car nous estimons qu’il serait souhaitable que le gouvernement investisse dans la création d’un parc, plutôt que de laisser se construire des résidences », a déclaré Christian Simard, directeur général de Nature Québec et membre de la Coalition, lors d’une conférence de presse jeudi.
Des coûts cachés Ainsi, l’étude dirigée par Madame Florence Junca-Adenot du Département d’études urbaines de l’UQAM et réalisée par l’analyste Juste Rajaonson démontre que le développement de ce projet est trop dispendieux et qu’il ne pourrait se réaliser sans ignorer les impacts environnementaux et sociaux. Elle appuie cette conclusion sur divers aspects de la morphologie du projet et de son emplacement. D’une part, le terrain compte 9 hectares de milieux humides sur les 20,5 hectares projetés dans le développement. D’autre part, les coûts reliés au développement des infrastructures, à l’aménagement, à la mise en place de services collectifs, à l’éloignement du site des services essentiels, sans mentionner les impacts sur le transport dans ce secteur du tunnel Louis-Hippolyte Lafontaine déjà fortement congestionné, de même que les pertes d’espèces rares — comme la couleuvre brune — sont banalisés, pour ne pas dire totalement évacués. De plus, selon les règles d’urbanisme en vigueur à la Ville de Longueuil, le site pourrait accueillir un maximum de 640 unités familiales et condominiums et non pas les 2 500 résidences comme le souhaite le promoteur. Cette ambition obligerait alors de détruire tous les milieux humides et le boisé de l’île. En ce sens, son développement contreviendrait complètement au Plan d’aménagement de la Communauté métropolitaine de Montréal qui soutient l’aménagement d’espaces verts et un accès au fleuve. « Le discours vert au niveau politique doit se traduire en termes concret au niveau de l’Île Charron. », complète Coralie Deny, du Conseil régional de l’environnement de Montréal. « Une partie de l’étude met en lumière les coûts jamais regardés en termes de transport public et scolaire, d’impacts sur la navigation fluviale (le promoteur projette ajouter une marina à l’ensemble), sur la faune, la flore, l’attractivité du parc national et plus important encore, sur la santé et la sécurité des résidents. Ne pas les comptabiliser, signifie dès lors qu’ils sont répartis sur l’ensemble de la société », rajoute Madame Junca-Adenot.
Les membres de la Coalition ne cachent pas leur inquiétude face aux enchères élevées qu’a lancé le promoteur en estimant que la valeur marchande du terraine s’élève à 35 Millions de dollars. Il y a quatre ans Investissement Luc Poirier en a fait l’acquisition pour 6 M $. Au cours de négociations, le gouvernement du Québec aurait offert une somme d’environ 15 M $, que l’investisseur aurait refusé. « Le promoteur a acheté ce terrain en connaissance de cause. On ne veut pas s’immiscer dans la négociation, mais le prix pourrait se rapprocher du prix payé avec une marge de profits pour quatre années. C’est au gouvernement de lire notre documentation et de faire ses démarches d’analyse », estime Florence-Junca-Adenot. Christian Simard, de Nature Québec se montre plus cinglant. « Le promoteur doit se comporter en citoyen responsable et demandant un juste prix, car réclamer 37 M $ pour ce terrain, c’est un rendement de type spéculatif. »
Entrevoir l’expropriation Les membres de la coalition appellent le MTQ à se montrer ferme face au promoteur et à planifier son achat en fonction d’intégrer l’île Charron au parc national des Îles-de-Boucherville. « Il ne nous reste que quelques semaines pour négocier. Le moratoire (interdisant le développement de l’île) sera levé le 29 octobre prochain », rappelle Coralie Deny. Tous les membres de la Coalition préfèrent une entente par achat plutôt que de devoir envisager l’expropriation, qui risque de causer de nouveaux délais dans la résolution du dossier. La population est d’ailleurs invitée à signer une pétition en ligne à l’adresse www.amisparcdesiles.ca afin de demander au gouvernement du Québec d’acquérir l’île Charron à un prix raisonnable et de l’annexer au Parc national des Îles-de-Boucherville.
— Informations complémentairesRapport d'études sur les contraintes, les impacts et les coûts d'un éventuel projet immobilier sur l'Île Charron, réalisé par le Département d’études urbaines de l’UQAM et le Forum Urba 2015, 25 mai 2011 : http://www.amisparcdesiles.ca/IMG/pdf/Charron_impacts_final260511.pdf |