Par Serge Fortier
Depuis plus de 30 ans, au Québec, des groupes se sont formés pour défendre des dossiers environnementaux. On pense à l’AQLPA (Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique), à Équiterre, à la Fondation David Suzuki, à Nature Québec, à Greenpeace, pour ne nommer que ceux-là.
Ces groupes ont des employés rémunérés et sont pour la plupart subventionnés, bien que, pour survivre et demeurer opérationnels, ils doivent compter sur la générosité des dons du public. Ces groupes veillent au grain pour apporter un éclairage sur les enjeux environnementaux des choix politiques de nos décideurs. Le terme « écologiste » ou « groupe écologiste » leur a été attribué. Parce que ces groupes s’opposent à des projets économiques, le mot « écologiste » est trop souvent perçu de façon péjorative par une partie du public, de la presse et des politiciens. Cette perception fausse le réel et important travail d’éveilleur de consciences que ces organismes jouent face à un lobby puissant et destructeur de l’environnement.
Le terme « écologiste » est aussi trop souvent employé pour qualifier des groupes de citoyens qui se rassemblent lorsqu’ils sentent que leurs conditions de vie sont menacées par des politiques ou des projets corporatifs dans leur environnement immédiat.
La mobilisation citoyenne qui a commencé en 2010 contre l’invasion de l’industrie du gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent en est un bon exemple. Ce dossier redevient d’actualité avec le projet de loi 106 qui accorderait tous les droits aux gazières et aux pétrolières sur le territoire québécois. Ces citoyens, non rémunérés, sacrifient leurs loisirs, du temps avec leur famille, leur travail, parce qu’ils jugent important de manifester leurs sentiments face à des projets menaçants pour leur qualité de vie.
Un agriculteur qui s’inquiète de se voir exproprié doit-il être qualifié d’écologiste?
Un producteur bio qui se verrait retirer son accréditation parce qu’un puits de gaz de schiste pollue sa terre est-il un écologiste?
Une mère de famille qui s’inquiète de la santé de ses enfants doit-elle être qualifiée d’écologiste?
Une municipalité qui se voit privée des pouvoirs de gestion de son territoire devient-elle écologiste?
Un centre touristique qui craint de perdre sa clientèle mérite-t-il le qualificatif d’écologiste?
Des citoyens qui s’inquiètent des conséquences de projets pétroliers et gaziers sur la qualité de leur eau potable deviennent-ils des écologistes?
J’aimerais ici attirer l’attention des journalistes, des politiciens et de tous ceux et celles qui véhiculent des idées, par des écrits ou par la parole, sur l’utilisation qu’ils font du terme « écologiste ». Ce terme ne peut s’appliquer à des citoyens soucieux de leurs conditions de vie et qui ont le courage de le manifester devant leur conseil municipal, leur MRC, dans la rue ou par tout autre moyen qu’ils imaginent pour se faire entendre – moyens qui d’ailleurs sont de plus en plus limités par des politiques antidémocratiques, comme le projet de loi 106.
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