La Chine a annoncé préparer «un calendrier» vers «une interdiction» de la production et de la vente de voitures à carburants fossiles: un pari titanesque pour le premier marché automobile mondial, qui s’apprête déjà à imposer aux constructeurs des quotas de véhicules propres.
Pékin serait-il prêt à emboîter le pas à la France et au Royaume-Uni, qui ont récemment dévoilé leur intention d’interdire la vente des voitures diesel ou essence sur leurs marchés d’ici 2040 ?
Soucieux de muscler sa lutte anti-pollution, le géant asiatique assure y réfléchir: des «études» sont entamées et le ministère de l’Industrie et des Technologies de l’information «va établir un calendrier en lien avec les administrations concernées», a indiqué ce week-end le vice-ministre de l’Industrie Xin Guobin. Sont essentiellement concernées les voitures à essence, le diesel restant confidentiel en Chine. «Les constructeurs devront, conformément aux exigences, améliorer le niveau d’économies d’énergie des voitures traditionnelles et développer vigoureusement les véhicules à énergies propres», a martelé M. Xin lors d’un discours à Tianjin (est) rapporté par les médias d’Etat.
Quel que soit le calendrier, le défi s’annonce herculéen: 28 millions de véhicules –dont 24,4 millions de voitures individuelles– ont été vendus l’an dernier en Chine. Sur ce total, seulement 507.000 véhicules «à énergie nouvelle» (électriques et hybrides) –ce qui reste une goutte d’eau, en dépit d’un bond de 53%, encouragé par des primes gouvernementales et des facilités d’immatriculation.
Le monde suivra
«C’est un processus de long cours», observe Cui Dongshu, secrétaire général de l’influente Association chinoise des voitures individuelles. «Il sera difficile d’arrêter la production de véhicules traditionnels à carburant sur les deux prochaines décennies» et au-delà, la tâche restera particulièrement ardue pour les poids-lourds, indique-il à l’AFP. Même fort vagues, les annonces du vice-ministre Xin ont contribué à faire bondir sur les Bourses chinoises les titres des constructeurs et équipementiers spécialistes de l’électrique, à commencer par BYD –le «Tesla chinois»–.
«Si la Chine dit non aux moteurs à combustion, le reste du monde suivra, car personne ne peut faire l’impasse sur la Chine, c’est un trop gros marché», souligne Bill Russo, directeur du cabinet GaoFeng Advisory à Shanghai. Pour lui, Pékin veut faire en sorte que le déclin du moteur à combustion «intervienne selon un calendrier qui permette aux constructeurs chinois d’élaborer leurs solutions». «Doper l’électrification, c’est aussi aplanir le marché pour les marques chinoises», auxquelles fait défaut l’avancée technique des occidentaux, estime-t-il.
En même temps, le régime communiste a entrepris de sabrer ses généreuses subventions à l’achat de véhicules propres pour les consommateurs, et entend désormais forcer la main aux constructeurs.
Il a introduit en juin un projet de règlement pour leur imposer dès 2018 un quota de «voitures propres», selon un complexe système de crédits calculés d’après leurs ventes. La politique entrera en application «prochainement», a confirmé M. Xin.
Elargir la gamme
L’équation apparaît compliquée pour certains constructeurs, à l’instar de l’allemand Volkswagen (4 millions de véhicules vendus en Chine l’an dernier). Il a conclu une coentreprise avec le chinois JAC pour rattraper son retard et vise «400.000 ventes de véhicules hybrides et électriques d’ici 2020 et 1,5 million d’ici 2025».
«La version finale (du quota) n’est pas encore publiée, mais nous travaillerons dur pour le respecter. Ce n’est pas facile, on est déjà en septembre», a confié à l’AFP Christoph Ludewig, porte-parole de Volkswagen en Chine, faisant état des «efforts colossaux» de l’entreprise.
L’américain Ford, lui, assure que 70% de ses modèles vendus en Chine seront disponibles avec l’électrification en option d’ici 2025, et vient d’établir une joint-venture dédiée à l’électrique avec le chinois Zotye: «Une stratégie agressive pour proposer une gamme complète» de l’hybride au 100% électrique, insiste Anderson Chan, porte-parole de Ford en Chine.
Quant au français Renault, dernier venu, il s’est adapté d’emblée aux nouvelles priorités de Pékin, et la perspective d’un quota ne l’effraie nullement: «On sait faire, nous avons déjà une technologie avancée», fait valoir Florence de Goldfiem, responsable de la communication en Chine.
Le groupe produira bientôt à Wuhan (centre) une berline électrique inspirée de sa Fluence Z.E, et il a créé fin août une nouvelle coentreprise avec son partenaire local Dongfeng, dédiée au développement de modèles électriques conformes aux standards chinois.
Source : AFP