Copenhague 2009 – Une introduction à la Conférence de Copenhague sur les changements climatiques

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Par Géraud de Lassus Saint-Geniès,
doctorant à la Faculté de droit de l’Université Laval et étudiant chercheur à la Chaire de recherche du Canada en droit de l’environnement


 

Mots-clés : Changements climatiques, émissions de gaz à effet de serre (GES), Protocole de Kyoto, Copenhague.

Du 7 au 18 décembre 2009, Copenhague accueillera une conférence internationale consacrée à la lutte contre les changements climatiques. Alors que cet évènement fait déjà – et fera encore – l’objet d’un traitement médiatique considérable, l’objectif de cette analyse est de présenter certains éléments qui permettront de mieux comprendre en quoi consiste cette conférence.

 

Qu’est-ce que la Conférence de Copenhague?

La Conférence de Copenhague est la réunion annuelle des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et des États parties au Protocole de Kyoto. La tenue de cette conférence est donc prévue par ces deux instruments juridiques. La CCNUCC, adoptée en 1992 (1), a créé un organe, la Conférence des Parties, qui se réunit chaque année pour adopter des mesures afin de renforcer la mise en œuvre de la convention. Cette Conférence tiendra sa 15ème rencontre à Copenhague. Le Protocole de Kyoto, adopté en 1997 (2) lors de la 3ème Conférence des Parties à la CCNUCC, a lui aussi créé sa propre Conférence des Parties. Elle se réunira pour la 5ème fois à Copenhague. Même si, conformément aux dispositions du Protocole de Kyoto, ces deux conférences se déroulent conjointement, il s’agit d’institutions juridiquement différentes. D’autres organes créés par la CCNUCC et le Protocole de Kyoto tiendront également des sessions lors de la conférence de décembre.

Pourquoi Copenhague est une rencontre si importante?

L’objectif de la CCNUCC était d’obtenir un consensus de l’ensemble des États pour lutter contre les changements climatiques. Les obligations inscrites dans cet instrument ont donc été peu conséquentes afin de susciter l’adhésion du plus grand nombre. Ainsi, cet accord ne contient aucune obligation chiffrée et contraignante de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Les pays développés, énumérés dans l’annexe I de la convention (3), ont toutefois accepté des obligations supplémentaires, mais non contraignantes, en raison de leur responsabilité historique dans l’origine des changements climatiques – ils émettent une plus grande quantité de GES depuis une plus longue période. Dans le Protocole de Kyoto, ces pays se sont engagés à réduire leurs émissions de GES d’au moins 5 % par rapport au niveau de l’année 1990 entre 2008 et 2012. Pour cela, chaque État a négocié son propre objectif de réduction : – 6 % pour le Canada, – 7 % pour les États-Unis, – 6 % pour le Japon, – 8 % pour l’Union européenne (4). Mais le Protocole de Kyoto a une durée de vie limitée. Il arrive à échéance le 31 décembre 2012. Si aucun autre accord n’est adopté et mis en vigueur d’ici là, seule s’appliquera la CCNUCC à partir de 2013. Pour éviter cette situation, les États ont entamé à a suite de la 11ème Conférence des Parties de Montréal en 2005 un processus de négociation au sein de deux groupes de travail pour l’élaboration d’un accord succédant au Protocole de Kyoto. Ces groupes rendront leurs conclusions lors de la Conférence de Copenhague.

Quels sont les enjeux de cette conférence?

Pour le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, la Conférence de Copenhague ne peut être un succès que si les pays développés renforcent leurs objectifs de réduction d’émissions, les pays en développement limitent l’augmentation de leurs émissions et les pays développés s’engagent à verser des fonds aux pays en développement pour assurer une transition vers une économie mondiale faible en carbone (5). Ces trois critères constituent les principaux enjeux des négociations.

En ce qui concerne les objectifs de réduction des pays de l’annexe I, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) recommande des niveaux de réduction entre 25 et 40 % par rapport au niveau de 1990 en 2020 et de 50 % en 2050. La différence entre ces objectifs et ceux du Protocole de Kyoto est considérable. Quant aux pays en développement, certains d’entre eux, tels que l’Inde, la Chine et le Brésil, sont devenus de gros émetteurs de GES. La question qui se pose est de savoir si ces États doivent consentir à des mesures particulières de limitation de leurs émissions de GES alors même que leur responsabilité historique dans l’origine des changements climatiques et leur situation socio-économique n’est pas identique à celle des pays développés. Enfin, le montant des ressources financières que les pays développés s’engageront à transférer vers les pays en développement sera également au centre des négociations. Rappelons que selon la CCNUCC, la mesure dans laquelle les pays en développement s’acquittent de leurs obligations dépend de l’exécution des engagements des pays développés en matière de transfert de ressources financières (6). En outre, la position des États-Unis, qui n’avaient pas ratifié le Protocole de Kyoto, comptera pour beaucoup dans le succès de la conférence. Sur le plan juridique, l’une des interrogations concerne l’avenir du Protocole de Kyoto. Alors que certains États souhaiteraient négocier un nouvel accord, d’autres voudraient voir le Protocole amendé de telle sorte qu’il puisse couvrir une nouvelle période d’engagements.

À quoi faut-il s’attendre?

Lors des discussions préparatoires de Barcelone tenues au début de novembre 2009, peu de progrès ont été effectués sur la définition des accords de réduction des émissions de GES des pays de l’annexe I et sur le montant de l’aide financière à accorder aux pays en développement. Ces derniers continuent par ailleurs d’invoquer la responsabilité historique des pays développés dans l’origine des changements climatiques pour justifier leur position dans les négociations qui consiste à refuser tout objectif chiffré et contraignant de réduction des émissions. Compte tenue de la nature des enjeux et des positions des États, il est très peu probable qu’un accord juridique contraignant soit adopté lors de la Conférence de Copenhague. Il faut sans doute davantage s’attendre à ce que des lignes directrices et des ententes de principes soient élaborées, au mieux. En cas d’échec des négociations, l’une des possibilités consisterait à convoquer une 15ème conférence « bis » au cours de l’année 2010. Cela s’est déjà produit lors de la 6ème conférence des États Parties à la CCNUCC. Cependant, la non adoption d’un accord contraignant ne doit pas nécessairement être considérée comme un échec des négociations car un « bon » consensus politique est toujours préférable à « mauvais » accord juridique.

De manière générale, l’histoire du droit international des changements climatiques montre que les grands évènements n’offrent pas un cadre propice à des négociations fructueuses. Peut-être Copenhague inversera-t-elle la tendance…



Par Géraud de Lassus Saint-Geniès,
doctorant à la Faculté de droit de l’Université Laval
et étudiant chercheur à la Chaire de recherche du Canada en droit de l’environnement


Géraud de Lassus Saint-Geniès est doctorant à la Faculté de droit de l’Université Laval. Sa thèse porte sur la mise en œuvre du principe d’intégration dans le régime international de lutte contre les changements climatiques. Il est titulaire d’une maîtrise en droit international et européen à l’Université Paris X Nanterre et d’un D.E.A. en droit international et droit des organisations internationales à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne.

 


Sources :

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La CCNUCC est entrée en vigueur en 1994. Elle est ratifiée par 192 États.
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Le Protocole de Kyoto est entré en vigueur en 2005. Il est ratifié par 189 États.
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Il s’agit des pays de l’OCDE ainsi que les anciens pays du bloc de l’Est.
(4) Les pays de l’Union européenne ont adopté un objectif de réduction commun qui a ensuite été réparti entre ses membres grâce à la définition d’objectifs de réduction nationaux.
(5) Ban Ki-moon, We can do it, New York Times, 25 octobre 2009.
(6) Article 4.7.

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