Par Chantal Gailloux
Mots-clés : Éco D2, grappes industrielles, technologies vertes, maillage économique, herbe à poux, ministère du Développement économique, innovation et exportation. Cinq entreprises françaises de la région Rhône-Alpes détentrices de technologies vertes et rassemblées sous l’appellation d’Éco D2 Synergie étaient de passage à Montréal et à Québec la semaine dernière, pour établir des partenariats d’affaires avec des PME québécoises. « Mutualisons, partageons, créons un portail qui nous permettra de mettre de l’avant nos compétences environnementales », a suggéré Éric Rogemond, président du consortium d’affaires français Éco D2, lors de la rencontre de maillage économique à Montréal. Chacune de ces entreprises a rencontré de dix à quinze sociétés québécoises par jour, afin de soit établir une relation commerciale aboutissant à la fabrication locale et à la vente de leurs produits ici, soit procéder à un transfert technologique mutuel par l’échange et le partage d’expertise. Les cinq PME françaises jouissent déjà d’une solide réputation en France. Elles recevaient au début de février le trophée Nord Isère 2010 des réseaux d’entreprises. Leur compétence s’étend de l’assainissement de l’eau et de l’air, à l’aménagement du territoire, tout en passant par l’efficacité énergétique. « Nous voulons rencontrer des candidats, des clients, mais également des grappes québécoises intéressées par la démarche d’Éco D2 Synergie », renchérit Michel Gabillon, vice-président de la Chambre de Commerce et d’Industrie Nord Isère (CCI Nord Isère), qui accompagnait la délégation française au cours de sa première mission économique en sol québécois. Leur souhait d’utiliser ces partenariats d’affaires comme tremplin pour percer de nouveaux marchés de part et d’autre de l’Atlantique n’est un secret pour personne. « Mais ce ne sont pas des sangsues! », dit Robert Gilardeau, conseiller en affaires internationales au ministère du Développement économique, innovation et exportation (MDEIE). « Éco D2 a bien manifesté son intention de partager ses compétences. » Le fonctionnaire provincial fait allusion à certaines entreprises étrangères qui, trop souvent, viennent exclusivement s’imprégner du savoir-faire québécois, sans pour autant offrir à leurs consœurs de les accompagner en France. Des partenariats en vue Déjà, la curiosité d’entreprises québécoises est piquée. Deval Combustion Inc., située à Le Gardeur, au nord-est de Montréal, s’est dite intéressée par le brûleur innovateur d’Eratec, membre de la délégation d’Éco D2. Ces brûleurs, qui sont des fours à biscuits industriels, utilisés notamment par la multinationale Kraft, permettent d’économiser de 15 à 20 % de l’énergie. « On vient d’aller discuter affaires ensemble », dit René-Jean Lavallée, directeur de l’ingénierie à Deval Combustion, au sortir de la rencontre de maillage. « Leur procédé est innovateur pour nous puisqu’en Amérique du Nord, il n’y a pas encore de fabricant de brûleurs radiants à infrarouge. » Deux autres sociétés québécoises ont flairé, elles aussi, la bonne affaire même si aucun contrat n’a encore été signé.
« Mutualisons, partageons, créons un portail qui nous permettra de mettre de l’avant nos compétences environnementales », Le savoir-faire québécois Mais les Français possèdent-ils un savoir-faire environnemental plus développé que celui des Québécois? Robert Gilardeau répond que non. « Si je m’étais fermé les yeux pour simplement écouter – en faisant abstraction de l’accent, bien sûr! –, j’aurais pu croire qu’il s’agissait d’entreprises québécoises. Nous possédons nous aussi une très grande expertise. » L’éolien, la gestion des matières résiduelles et l’agroalimentaire sont des exemples de domaines d’expertise québécoise qui pourraient trouver preneurs en France, selon Xavier Fonteneau, directeur du projet d’Action concertée de coopération régionale de développement (ACCORD) chapeauté par le MDEIE. ACCORD accompagne les entreprises des régions dans la mise sur pied des grappes industrielles, qu’ils nomment plutôt créneaux d’excellence au ministère. Sur les 44 regroupements québécois d’entreprises hors Montréal, une dizaine ont des intérêts dans le secteur de l’environnement. Par contre, un seul regroupement québécois nommé Écotech Québec – formé il y a à peine quelques mois au sein de la Communauté métropolitaine de Montréal – se spécialise uniquement et spécifiquement dans les technologies vertes. Écotech Québec serait donc l’équivalent québécois d’Éco D2. Toutefois, le sous-financement de ces regroupements industriels rend leur épanouissement difficile. Cette situation découlerait, selon le conseiller en affaires internationales au MDEIE, du mode de financement régionalisé des créneaux d’excellence.
Des champs de tournesol envahis à 75 % par l’ambroisie.
(Source : Muriel Button, Evinerude) L’herbe à poux en France : « Un grand n’importe quoi! » La firme Evinerude, spécialisée en biosurveillance de pollution atmosphérique, est épatée par la stratégie des municipalités québécoises pour contenir l’invasion l’ambroisie, que l’on surnomme ici herbe à poux. Après avoir rencontré la municipalité de Laval, Muriel Button, responsable commerciale de cette entreprise membre d’Éco D2, se rend compte que son success story français est bien limité en comparaison de la stratégie des municipalités québécoises. « Au pays viennois, près de Lyon, on a commencé à s’occuper de limiter l’envahissement de l’ambroisie il y a trois ans seulement. À cette époque, c’était du grand n’importe quoi, si je puis dire. Rien n’avait été fait, c’était le résultat d’un laisser-faire complet. Ici, au contraire, des plans de gestion synchronisés ont déjà été mis en place. C’est un problème énorme en Europe, plus particulièrement en Suisse, en Italie et en France. Par exemple, la région Rhône-Alpes compte des champs envahis à 75 % par cette plante invasive. » Toutefois, la consœur d’Evinerude, la Française Eratec, pourrait mettre son traitement de l’herbe à poux par rayons infrarouges en commun. Sa technologie a d’ailleurs retenu l’attention du ministère de la Santé et des Services sociaux. Ce partage d’expertise environnementale pour contenir l’invasion d’herbe à poux constitue un bel exemple de mutualisation entre le Québec et la France pour protéger l’environnement. Dominic Viennot, responsable de l’organisation de la mission économique du consortium français, croit d’ailleurs qu’il s’agit de la piste de collaboration Québec/Rhône-Alpes la plus concrète jusqu’à présent.
Faits saillants
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