Une étude scientifique met en lumière les impacts des énergies renouvelables sur l’environnement. Sans remettre en cause leur développement, elle préconise une meilleure prise en compte de la biodiversité dans les politiques énergétiques.
Le développement des énergies renouvelables (EnR) dans le cadre de la transition énergétique ne va pas sans conflit. A l’encontre tout d’abord des intérêts liés aux énergies fossiles mais aussi, de manière moins attendue, avec les défenseurs de la nature et des paysages, conduisant parfois à de rudes batailles entre deux camps se targuant chacun de défendre l’environnement.
Une étude de littérature parue dans Renewable and Sustainable Energy Reviews, vulgarisée par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), identifie les impacts des différentes filières EnR. Elle montre l’importance de prendre en compte ces impacts sur les espèces et les écosystèmes le plus en amont possible. Les résultats de cette étude ont été présentés lors de la journée FRB du 5 octobre 2017 consacrée aux «liaisons dangereuses» entre biodiversité et transition énergétique, qui a toutefois montré que toutes les filières ne devaient pas être logées à la même enseigne.
Des impacts non négligeables sur la biodiversité
«Les filières d’énergie renouvelable sont souvent considérées implicitement comme étant favorables à l’environnement en raison de leur rôle crucial dans la lutte contre le changement climatique. En vérité, il n’existe pas de filière d’énergie renouvelable qui n’ait aucun impact sur l’environnement actuellement, surtout si elles doivent être déployées à grande échelle pour permettre une transition rapide vers une économie verte«, conclut l’étude selon la synthèse réalisée par Jean-François Silvain, président de la FRB.
L’impact le plus important est constitué par la perte ou la modification des habitats, en particulier du fait de la construction de structures auxiliaires telles que les routes. Mais d’autres effets négatifs sont recensés comme la mortalité directe des oiseaux par collision, la pollution, la compétition pour les usages de l’eau ou la modification des microclimats qui perturbent les écosystèmes, rapporte la Fondation. Si l’étude n’oublie pas de recenser les effets positifs possibles pour la biodiversité, ceux-ci semblent limités dans la plupart des cas à la création de nouveaux habitats pour les espèces.
Des effets de surexploitation indirecte dus au changement d’usage des terres peuvent aussi apparaître, indique l’étude, qui cite comme points de préoccupation l’expansion future des biocarburants en Afrique subsaharienne, de l’hydroélectricité dans l’Himalaya indien et de l’énergie marine en Europe. «Des effets non linéaires peuvent apparaître lors du développement de ces filières et (…) des impacts apparemment faibles pourraient devenir considérables lorsque les technologies d’énergie renouvelable sont déployées à grande échelle«, ajoute l’étude.
L’hydroélectricité et la biomasse pointées du doigt
Les pressions sur la nature varient toutefois considérablement selon les filières et les contextes environnementaux étudiés. Les impacts négatifs sur les écosystèmes sont davantage établis pour l’hydroélectricité et l’exploitation de la biomasse végétale que pour les filières solaire, éolienne, énergies marines et géothermie. (…)
«A l’avenir, ces pressions vont s’accroître», alerte la FRB, qui précise concernant l’hydroélectricité que 80% des grands rivières mondiales devraient à terme être équipées. Ce qui menacerait les bassins de l’Amazonie, du Mékong et du Congo qui contiennent à eux trois plus de 18% de la diversité mondiale des poissons d’eau douce.
Trouver des compromis avec l’agriculture, la foresterie et la pêche
L’identification de ces impacts remet-elle en cause le développement des EnR ? Non, répond l’étude qui ne remet pas en question «la logique fondamentale de la promotion des énergies renouvelables qui présentent des avantages environnementaux et socioéconomiques élevés«. Mais, pour résoudre les conflits d’usage, ses auteurs soulignent la nécessité de trouver des compromis avec les secteurs économiques qui dépendent directement des ressources biologiques telles que l’agriculture, la foresterie et la pêche. Des compromis qui doivent aussi être trouvés du fait des pertes de services de régulation ou de services écosystémiques culturels, par exemple de loisir, liés au développement des EnR.
Les auteurs de l’étude proposent, pour chaque filière, une démarche hiérarchique d’atténuation des impacts du type «éviter-minimiser-restaurer-compenser«. La mesure la plus évidente est la localisation des installations énergétiques dans les zones à faible biodiversité, comme l’a illustrée la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) vis-à-vis des sites Natura 2000 dans son étude de juin 2017 sur la mortalité des oiseaux imputable aux éoliennes.
Source: Actu-Environnement. Auteur: Laurent Radisson