Face à l’engouement suscité par l’idée de « manger local », le chercheur Nicolas Bricas appelle à la prudence. Pour ce dernier, les villes ne devraient pas oublier de nouer des liens de solidarité avec les campagnes, même lointaines.
Les initiatives sont nombreuses pour produire une alimentation au plus près des consommateurs urbains. Pour autant, il est « impossible d’imaginer l’autonomie alimentaire des villes », estime Nicolas Bricas, chercheur au Cirad* et directeur de la chaire Unesco Alimentation du monde. Il est intervenu sur le sujet lors d’un séminaire international organisé par l’Agence bio, le 29 mars.
Selon le chercheur, l’agriculture urbaine est « une illusion », compte tenu du niveau de concentration des villes. Pour ne citer qu’un exemple, tout le département de l’Hérault ne suffirait pas à nourrir les habitants de Montpellier. Sans compter que depuis 2008, plus de la moitié de l’humanité vit en ville.
Retour à la proximité
L’engouement pour une alimentation de proximité serait une réaction à la distanciation géographique, cognitive, sociale et politique qui s’est instaurée entre les pourvoyeurs de produits alimentaires et les consommateurs. Ces derniers comprennent de moins en moins la façon dont est produit ce qu’ils mangent. Face à cela, l’agriculture locale apparaît comme une solution pour rassurer les consommateurs.
Le système alimentaire est également perçu comme étant « aux mains d’organisations professionnelles et de technocrates de Bruxelles », précise Nicolas Bricas. Les citoyens n’auraient ainsi pas les moyens d’orienter les politiques alimentaires comme ils le souhaitent. Dans un tel contexte, les villes se préoccupent de plus en plus de l’alimentation, en acquérant du foncier ou à travers la restauration collective. En 2015, plus de 100 villes du monde ont ainsi signé le Pacte de Milan, en s’engageant notamment à mettre en place une gouvernance alimentaire locale.
Source: Pleinchamp
Crédit photo: Ferme Lufa sur Wikimedia Commons