200 spécialistes demandent une réflexion sur la «post-croissance»

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Les signataires s’adressent en particulier à l’Union européenne, à l’aube de la conférence «Post-Growth 2018 qui a lieu à Bruxelles en Belgique. Photo : Unsplash

Dans le cadre de la conférence sur la post-croissance appelée «Post-Growth 2018» qui aura lieu les 18 et 19 septembre à Bruxelles, des scientifiques et spécialistes de plusieurs pays ont co-signé une lettre demandant à l’Union Européenne de reconsidérer l’idée de la croissance du PIB en tant qu’objectif économique premier des nations européennes, afin de limiter l’impact des activités économiques sur l’environnement. Ils qualifient la post-croissance comme une économie «axée directement sur le bien-être humain et écologique»

Voici un extrait de la lettre publiée en français dans les pages du journal Libération et en anglais par The Guardian. La version complète de la lettre et la liste des 200 signataires est disponible sur cette page

[…]

Au cours des sept décennies passées, la croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) s’est dressée comme l’objectif économique premier des nations européennes. Mais si nos économies ont grandi, l’impact négatif sur l’environnement a augmenté en rapport. Nous dépassons aujourd’hui l’espace de fonctionnement sécurisé pour l’humanité sur cette planète, et il n’y a aucun signe que l’activité économique soit en voie de découplage avec l’usage des ressources ou la pollution, à l’échelle qui serait requise. En parallèle, aujourd’hui, résoudre les problèmes sociaux au sein des pays européens ne demande pas plus de croissance économique : cela implique plutôt une distribution plus juste du revenu et de la richesse déjà acquis.

La croissance économique devient également plus difficile à atteindre notamment du fait du déclin des gains de productivité, de la saturation des marchés et de la dégradation écologique. Si les tendances actuelles persistent, la croissance économique européenne pourrait bien s’enrayer définitivement dans moins d’une décennie. Aujourd’hui la réponse politique consiste principalement à essayer d’entretenir la croissance par la dette, l’affaiblissement des régulations environnementales, l’extension des heures de travail et des coupes dans les systèmes de protection sociale. Cette recherche agressive pour de la croissance économique à tout prix divise la société, crée de l’instabilité économique et affaiblit la démocratie.

[…]

Étant donné l’ampleur des enjeux, il serait irresponsable que les acteurs politiques et les décideurs n’explorent pas les possibilités d’un avenir post-croissance. La Conférence qui se tient à Bruxelles est un coup d’envoi prometteur, mais des engagements bien plus importants sont nécessaires. En tant que groupe de scientifiques concernés – travaillant tant dans les domaines des sciences naturelles que des sciences humaines et sociales – et issus des 28 États-membres, nous appelons l’Union Européenne, ses institutions et États-membres à:

  1. Mettre en place une commission spéciale sur les avenirs post-croissance au niveau du Parlement Européen / Cette commission doit débattre activement de l’avenir de la croissance, proposer des politiques publiques alternatives et reconsidérer la poursuite de la croissance en tant qu’objectif politique général.
  2. Incorporer des indicateurs alternatifs dans le cadre macroéconomique de l’Union Européenne et de ses États-membres / Les politiques économiques doivent être évaluées en fonction de leur impact sur le bien-être humain, l’utilisation des ressources naturelles, les inégalités sociales et la génération d’emplois décents. Dans les processus de prise de décision, ces indicateurs doivent avoir une priorité supérieure au PIB.
  3. Transformer le Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC) en un Pacte de Stabilité et de Bien-être / Le PSC est un jeu de règles visant à limiter les déficits gouvernementaux et les dettes nationales. Il doit être révisé pour que les États-membres répondent aux besoins fondamentaux de leurs citoyens, tout en ramenant l’utilisation des ressources naturelles et la production de déchets à un niveau soutenable.
  4. Établir dans chaque État-membre un Ministère de la Transition Économique / Une nouvelle économie axée directement sur le bien-être humain et écologique peut offrir un avenir bien meilleur que celui qui dépend structurellement de la croissance économique.

Auteurs :

Dr Dan O’Neill, Associate Professor, University of Leeds, UK
Dr Federico Demaria, Researcher, Universitat Autònoma de Barcelona, Spain
Dr Giorgos Kallis, Professor, Universitat Autònoma de Barcelona, Spain
Dr Kate Raworth, author of ‘Doughnut Economics’, UK
Dr Tim Jackson, Professor, University of Surrey, UK
Dr Jason Hickel, Lecturer, Goldsmiths, University of London, UK
Dr Marta Conde, President of Research & Degrowth, Spain

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