Par Cédric Chaperon,
Chargé de projet en énergie et changements climatiques au Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec (RNCREQ)
Mots clés : Canada, changements climatiques, sables bitumineux, Protocole de Kyoto, Copenhague. Lors de la 15e conférence sur les changements climatiques de Copenhague, trouver un accord global sur le climat relèvera du treizième des douze travaux d’Hercule. Car rien n’indique que l’on réussira à dégager des consensus sur une multitude d’enjeux urgents comme, par exemple, la définition d’un objectif commun de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES) pour les pays industrialisés; les engagements des pays émergents, qui seront ensuite étroitement reliés au premier enjeu; ainsi que les outils et mécanismes de paiement pour les coûts de l’action et de l’adaptation aux changements climatiques. Pourtant, la pression est forte de la part de la communauté scientifique internationale, où la majorité des groupes d’experts y vont chacun de leur rapport d’alerte. Bien sûr, les constats, prévisions et conséquences sur les changements climatiques que nous vivons diffèrent selon les rapports. Mais une chose est certaine, la nécessité d’agir rapidement se fait sentir et les raisons ne sont pas uniquement écologiques et environnementales, puisqu’elles sont aussi économiques. Rappelons qu’en 2006, le rapport de Sir Nicolas Stern, ancien vice-président senior de la Banque mondiale, chiffrait qu’un investissement de 1% du PIB mondial par an dans la réduction des émissions de GES dès aujourd’hui permettrait d’éviter une perte économique comprise entre 5 % et 20 % du PIB mondial chaque année dans l’avenir. Plus récemment, une étude commandée par la Fondation David Suzuki à l’institut Pembina démontrait que le Canada pouvait se lancer dans la lutte aux changements climatiques sans affecter sa croissance économique à long terme. Pauvre Canada! Le Canada fait figure de dernier de la classe depuis déjà très longtemps face à la communauté internationale. Malgré sa ratification du Protocole de Kyoto, le gouvernement conservateur de Stephen Harper n’a finalisé aucun plan et ne s’est fixé aucun objectif sérieux en ce qui concerne ses objectifs de réduction d’émissions de GES. En outre, il dépasse actuellement de 33,8 % l’objectif qu’il doit respecter en vertu du Protocole. Le Canada émet aujourd’hui 747 mégatonnes de GES, ce qui correspond à une hausse de près de 26 % par rapport au niveau de 592 mégatonnes observé en 1990. Le bonnet d’âne revient donc au Canada. Ignorant la problématique depuis longtemps, il se classe ainsi au dernier rang des pays du G8 sur le dossier des changements climatiques avec un modeste engagement de 20 % de réduction par rapport au seuil de 2006 (ce qui équivaut à une réduction d’environ 3 % par rapport à 1990). Les recommandations du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) sont telles que les pays industrialisés doivent réduire leurs émissions de GES de 25 % à 40 % à l’horizon 2020 pour éviter de se trouver dans une situation irréversible et incontrôlable.
Un crime écologique Cependant, le gouvernement canadien en a décidé autrement : par l’exploitation des sables bitumineux en Alberta, regorgeant de pétrole, le Canada participe bel et bien à un crime écologique en règle puisqu’aucune réglementation n’existe sur les grands émetteurs industriels de GES. Cette absurdité est telle que la production d’un baril de pétrole nécessite un demi-baril en énergie et quatre baril d’eau chauffée au gaz naturel. Tout en considérant que la forêt boréale aujourd’hui dévastée correspond à la superficie de la Belgique. Les pétrolières projettent pourtant de tripler l’exploitation des sables d’ici 2020. Solidarité oblige… Assurément, si tous les membres de la communauté internationale maintiennent à Copenhague leurs seuls intérêts individuels et économiques, la planète coure vers la catastrophe. Ne serait-il pas temps de profiter de ce momentum pour définir ensemble une vraie politique globale d’action contre les changements climatiques qui jettera les bases d’un nouveau paradigme?
Par Cédric Chaperon, Cédric Chaperon a étudié en France et détient un baccalauréat management des organisations de l’économie sociale et solidaire, ainsi qu’une maîtrise en Sciences Politiques mention développement durable et environnement. Chargé de projets en énergie et changements climatiques au Regroupement des conseils régionaux de l’environnement (RNCREQ), il participe notamment à la coordination de la campagne Défi Climat en région ainsi qu’aux travaux du RNCREQ pour les commissions parlementaires, les projets d’envergure nationale, et coordonne les activités des CRE lors de démarches communes. |