Par Éloise Savoie, déléguée de l’AQLPA
Mots-clés: adaptation, changements climatiques, accès à l’eau, sécurité alimentaire, pays les moins avancés
L'adaptation aux changements climatiques est l'un des thèmes les moins polémiques des négociations internationales sur le climat. Les pays reconnaissent à l'unanimité l'importance de soutenir les pays en développement dans la nécessité de s'adapter aux changements climatiques. Les négociations en matière d'adaptation sont donc généralement plus techniques que politiques et se concentrent sur le processus et les structures plutôt que sur des thèmes tels que la sécurité alimentaire ou l'accès à l'eau.
À Durban, les pays tentent de s'entendre sur la composition du comité qui présidera le fonds d'adaptation, une discussion engagée par les pays les moins avancés (PMA) qui souhaitent une représentation plus équitable dans la répartition des sièges. Les pays à la table des négociations évaluent également comment le processus en lien avec la finance sera mis sur pieds puisque l'argent proviendra de différents fonds.
Bref, rien à voir avec la tension et l'agitation occasionnées par les négociations au sujet d'une deuxième période d'engagement du protocole de Kyoto.
Et pourtant…
Plus les négociations en matière d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre à l'échelle globlale tarderont à êtres conclues, plus l'adaptation deviendra un enjeu central des négociations sur le climat. Les populations les plus vulnérables, notamment dans les îles du Pacifique et en Afrique, souffrent déjà des conséquences des changements climatiques et la fréquence et l'intensité des catastrophes ne fera qu'augmenter dans les années à venir.
Malgré les avancées en matière d'adaptation obtenus à Cancun lors de CdP16 l'an dernier, il existe encore un immense fossé entre les négociations et les mécanismes réels d'adaptation. Ce manque de connection entre les pourparlers et la réalité sur le terrain provient notamment du fait que les représentants dans les comités d'adapatation sont des négociateurs, et non pas des ministres de l'environnement ou de l'agriculture, qui auraient une compréhension plus juste des enjeux d'adaptation. Les ministres préfèrent généralement concentrer leur énergie sur les questions plus politiques telles que l'atténuation ou la finance.
À l'échelle nationale
Bien qu'essentielles, pendant que les négociateurs planifient les structures internationales qui encadreront l'adaptation aux changements climatiques, la prise en charge de l'adaptation sur le terrain est partagée entre les gouvernements nationaux et les ONG. La vulnérabilité des pays en voie de développement se caractérise par l'intensité et la fréquence des désastres naturels, mais également par le niveau de préparation et la capacité à réagir des États. C'est dans cette optique qu'un support financier et technique de la communauté internationale est essentiel. C'est également pourquoi les négociations internationales actuelles en matière d'adaptation aux changements climatiques sont pertinentes, mais encore incomplètes puisqu'aucun mécanisme visant à faire le pont entre l'issue des négociations et l'adaptation des populations locales aux conséquences dramatiques des changements climatiques n'a encore été élaboré.
Du bas vers le haut: prévoir l'imprévisible
Les mesures d'adaptation ne sont pas encore toutes en place que les ONG intervenant sur le terrain commencent déjà à dénoncer le manque de nuances dans la perception de l'adaptation aux changements climatiques. La pensée dominante actuelle présente l'adaptation comme une réponse ou un ajustement aux impacts déjà connus grâce à la science et aux évènements passés.
Une nouvelle tendance au sein des experts terrain en matière d'adaptation commence à émerger; celle-ci tente secouer cette vision très statique en rappelant qu'une grande partie des évènements à venir sont inconnus. L'idée générale est de cesser de simplement mettre en oeuvre des stratégies, mais de s'adapter aux processus et continuer de faire avancer la question de l'adaptation en tenant compte de la vulnérabilité des populations et surtout de leur incertitude face à l'avenir. Il est notamment difficile pour une communauté d'améliorer sa capacité à s'adapter aux changements climatiques sans savoir quand aura lieu la prochaine catastrophe et c'est un aspect dont l'adaptation ne tient pas compte pour l'Instant.
À l'heure actuelle, nous ne savons toujours pas si le Protocole de Kyoto aura survécu à la conférence de Durban, alors que les Parties pourraient en arriver à un accord sur les questions d'adaptation avant même la fin de la conférence. Il sera donc important que les instances internationales et nationales commencent à travailler de concert pour s'assurer que les populations locales bénéficient réellement des avancées en matière d'adaptation obtenues à CdP17.