Par Thomas Scorticati
Étudiant à la maîtrise en Études de politiques appliquées à l’Université de Sherbrooke
Pour renforcer les capacités des négociateurs africains lors des réunions des Nations sur les changements climatiques, l’Institut de la Francophonie pour le Développement Durable (IFDD), situé à Québec et partenaire de GaiaPresse, a bâti le projet NECTAR (Négociation Climat pour Toute l’Afrique Réussie). Le programme se charge de soutenir les négociateurs francophones de pays d’Afrique pour leurs permettre d’avoir une position ferme et technique lors des Conférence des Parties (CdP) sur les changements climatiques.
Selon le dernier rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) paru début novembre, le réchauffement observé depuis le début du XXème siècle a une certitude de 95% qu’il soit de nature humaine. C’est un consensus scientifique. Autant dire, il n’y a plus de doute. Pour pallier à ce fléau, les pays industrialisés se sont mis d’accord, lors du dernier rapport de Kyoto, de réduire de 5% les émissions de gaz à effet de serre en 2012 par rapport à 1990. Un échec foudroyant puisque l’Organisation Météorologique Mondiale révèle que les émissions ont augmenté de 34%.
Pourtant, les pays les moins pollueurs sont bien souvent les plus vulnérables face à ces changements climatiques. Le continent africain est seulement responsable de 4 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la planète. Un bien maigre (et encourageant) record, quand on sait que les Etats-Unis et la Chine pèsent à eux deux 42% des émissions mondiales de CO2 en 2013. De plus, ces émissions de GES, cause du réchauffement et donc des catastrophes naturelles, sont difficiles à surmonter pour les pays du continent africain. En effet, le secteur agricole est bien trop fragile, menant à des crises de famines comme ce fut le cas en Somalie durant l’année 2011.
Des mécanismes ont été élaborés par la communauté internationale pour aider les pays en développement à s’adapter aux changements climatiques et à promouvoir une politique de développement durable. Ainsi, le protocole de Kyoto a mis en place le mécanisme de développement propre (MDP) permettant aux pays industrialisés de soutenir les pays en développement dans leurs réductions de GES. Sur papier, c’est un mécanisme financier gagnant-gagnant. Or, les pays en développement de l’Afrique bénéficient moins de 3% du total mondial de ce mécanisme. De plus, les transferts de technologies propres pour aider les pays en développement à s’adapter aux changements climatiques sont quasi inexistants sur le continent africain.
Les émissions de GES dans l’atmosphère, le faible taux de transferts de technologies ou encore les mécanismes financiers inefficaces pour les pays en développement de l’Afrique sont les conséquences d’une mauvaise intégration de ces derniers lors des négociations internationales. Les pays en développement, et plus particulièrement les pays africains, sont mis à l’écart des discussions alors que ce sont les premiers concernés. Les pays industrialisés se réunissent bien souvent entre eux, à huit clos et sans en avertir le reste de la communauté internationale.
Pour que les pays en développement, notamment africains, soit davantage intégrés aux négociations internationales, il est important qu’ils aient une position ferme et une compréhension de la technicité des enjeux climatiques. Ainsi, l’IFDD, a mis sur pied le projet NECTAR. Ce programme, soutenue entre autre par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), a pour objectif de rendre efficace les négociateurs africains Francophones sur la scène internationale. Pour ce faire, l’organisme propose des ateliers de formations dans plusieurs pays, des écoles d’été avec plus de 75 participants représentant plus de 12 pays ou encore des guides destinés aux décideurs publiés peu de temps avant les CdP. En effet, la majorité des textes publiés par les Nations Unies, ont un langage technique, lourd et en anglais. L’IFDD se charge de les rendre plus simple et en français.
Ce projet fort ambitieux n’a jamais été évalué pour savoir s’il est efficace. Ainsi, deux membres de la Délégation Climat de l’Université de Sherbrooke se rendront à la CdP de Lima au Pérou pour analyser les impacts du projet NECTAR. Ils auront pour rôle de rencontrer les ministres des pays francophones africains, les négociateurs africains, tout intervenants directs ou indirects au programme et assisteront aux conférences pour analyser la pertinence des discours des négociateurs.