Retour sur la Loi visant l’augmentation du nombre de véhicules automobiles zéro Émission au Québec

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Photo : Minesweeper

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L’Assemblée nationale du Québec a adopté à l’unanimité, le 26 octobre 2016, le texte de la Loi visant l’augmentation du nombre de véhicules automobiles zéro émission au Québec afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et autres polluants (LVZE). Cette loi avait initialement été déposée à titre de projet (Projet de loi 104), le 2 juin 2016.

Dans le cadre de cet article, nous expliquerons le régime proposé par la LVZE et nous en commenterons certains aspects.

L’objectif

En adoptant la LVZE, le gouvernement du Québec s’est doté d’un instrument visant à favoriser l’atteinte de sa cible de 100 000 véhicules « branchables » immatriculés d’ici 2020. Cette cible a été fixée dans le cadre du Plan d’action en électrification des transports 2015‑2020. Pour ce faire, la LVZE prévoit un régime visant à accroître l’offre de véhicules zéro émission (VZE) sur le marché québécois.

Bien que la LVZE représente la première loi du genre au Canada, nous notons qu’elle s’aligne sur les concepts généraux issus de l’expérience californienne[1], aujourd’hui étendue à plusieurs États américains de la Côte Est [2].

Le régime

La LVZE impose aux constructeurs automobiles de vendre ou de mettre en location, à partir de l’année modèle 2018, un certain nombre de VZE. Cette obligation s’applique aux constructeurs vendant ou louant plus de 4 500 véhicules neufs en moyenne par année, si bien que la quasi-totalité des constructeurs serait assujettie à la LVZE.

Au moment de la vente ou de la location d’un tel véhicule, le constructeur obtiendra des crédits, dont le nombre variera en fonction de l’autonomie en mode électrique du véhicule vendu ou loué. Les règles de calcul pour l’attribution des crédits seront élaborées par règlement.

À l’expiration d’une période de 3 ans (la première débutant en 2018), les constructeurs assujettis devront détenir un certain nombre de crédits. Ce nombre sera différent pour chaque constructeur, puisqu’il sera déterminé en fonction de leur volume de vente de VZE et de véhicules traditionnels au Québec. Le mécanisme permettant de fixer les cibles applicables à chaque constructeur sera ultérieurement élaboré par voie réglementaire.

  L’obligation d’accumuler des crédits

Pour déterminer combien de crédits un constructeur devra accumuler, le Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) classera, par règlement, les constructeurs en catégories. Les modalités de calcul du nombre de crédits à accumuler différeront selon celles-ci. Ainsi, chaque vente ou location d’un VZE reconnu par le ministre rapportera des crédits au constructeur, dont le nombre variera en fonction de l’autonomie en mode électrique du véhicule. Plus grande sera l’autonomie du véhicule vendu ou loué, plus le constructeur obtiendra de crédits, ce qui diminuera le nombre de VZE qu’il devra vendre pour atteindre sa cible.

  La méthode d’accumulation des crédits

La LVZE prévoit trois façons d’accumuler les crédits requis. La première façon consiste à vendre ou à louer des véhicules neufs répondant aux caractéristiques suivantes :

  • Ils sont entièrement électriques ou hybrides ;
  • La pile est rechargeable au moyen d’une source d’alimentation externe au véhicule ;
  • Ils sont immatriculés au Québec au moment de la déclaration ;
  • Ils figurent sur la liste publiée par le MDDELCC.

La seconde façon d’obtenir des crédits consiste à la vente de véhicules remis en état et importés au Québec. Bien que le calcul sera similaire, les crédits générés seront moins nombreux.

Finalement, puisqu’il s’agit d’un système d’échange, il sera également possible d’obtenir des crédits en les achetant auprès d’un autre constructeur qui en possède plus que nécessaire. Le contrat de vente devra alors être constaté par écrit et déclaré au MDDELCC par chacune des parties. À ce sujet, nous précisons que des petits constructeurs qui se spécialisent dans la fabrication de VZE, mais qui ne seront pas assujettis à la LVZE, pourraient décider de s’y assujettir sur une base volontaire.

  Le défaut d’accumuler le nombre de crédits requis et la transmission de renseignements

À tous les trois ans, le MDDELCC établira le seuil de crédits devant être accumulés par chaque constructeur. Si un constructeur n’a pas accumulé suffisamment de crédits, il sera tenu de payer, dans les trois mois qui suivent l’envoi par le Ministre d’un avis de réclamation, une redevance dont les paramètres, les règles de calcul, les conditions et les modalités de paiement seront fixés par règlement du gouvernement

Quelques commentaires

La LVZE représente un instrument pouvant contribuer à la lutte contre les changements climatiques. Toutefois, son impact pourrait être limité, puisqu’il se limite aux VZE. Il aurait été pertinent d’élargir sa portée afin d’inclure, dans le système de gestion de l’offre proposé, les véhicules à faibles émissions de gaz à effet de serre (GES).

En plus de l’élargissement de la portée du Projet de loi 104, d’autres mesures pourraient être envisagées par le gouvernement pour atteindre ses cibles de réduction des émissions de GES. Les programmes de prime à la casse ou d’inspection obligatoire, pour les plus vieux véhicules, ont déjà fait leurs preuves et il serait pertinent que le gouvernent envisage leur mise en place.

Par ailleurs, le texte de la LVZE semble largement inspiré du régime californien et de celui des États américains du nord-est. Il ne semble pas prendre en compte la réalité du marché automobile québécois.
En somme, la réglementation à venir sera déterminante afin de pouvoir évaluer la portée réelle de cette loi, de ses contraintes et de son impact potentiel sur le marché québécois quant aux ventes de véhicules automobiles.


[1] « History of California’s Zero Emission Vehicle (ZEV) Program », Union on concerned scientists, en ligne: <http://www.ucsusa.org/clean_vehicles/smart-transportation-solutions/advanced-vehicle-technologies/electric-cars/californias-zero-emission-1.html#.V2SFB-bhD_Q> (consulté le 20 juin 2016).

[2] « ZEV mandate », Alliance of automobile manufacturers, 2016, en ligne: <http://www.zevfacts.com/zev-mandate.html> (consulté le 20 juin 2016).


 

louisphilippe Louis-Philippe Lefebvre 

Directeur des affaires publiques et législatives au Conseil patronal de l’environnement du Québec (CPEQ), il s’intéresse à diverses questions d’ordre environnemental, notamment le développement durable et la responsabilité sociale d’entreprise.  Le CPEQ représente, de façon unifiée et dans un contexte de développement durable, le point de vue du secteur d’affaires du Québec sur des enjeux importants d’intérêt général et commun, en coordonnant les objectifs de ses membres.


olivierOlivier Dulude

Finissant au Baccalauréat en droit à l’Université de Montréal, l’auteur s’intéresse particulièrement au droit public. En plus de travailler au Conseil patronal de l’environnement du Québec comme chargé de projet depuis l’été 2016, il a en effet participé à l’Observatoire des mesures visant la sécurité nationale, à l’Observatoire national en matière de droits linguistiques et a mené à bien un mandat pour le compte du Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal. Il s’implique par ailleurs auprès de l’Opération droits blindés.

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