Le changement climatique affecte déjà l’homme

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Un pêcheur australien, avec un poisson herbivore tropical responsable de la destruction des forêts de kelp. © FABIO VARRONE/REDMAP.ORG  

La redistribution du vivant sous l’effet de la hausse des températures est une lame de fond, affirment les 41 chercheurs de 14 pays qui publient dans Science une étude sur l’impact du réchauffement climatique sur la biodiversité et par ricochet sur l’homme.

Adaptation

Pour la première fois, une étude scientifique parue dans Science relie les déplacements et adaptations des espèces végétales et animales au réchauffement climatique avec les premières perturbations sur le bien-être humain. “ L’homme se nourrit, se chauffe, se protège, se soigne grâce à des biens prélevés dans la nature, résume Jonathan Lenoir, écologue à l’Université Jules Verne de Picardie et l’un des 41 auteurs de l’article. Le réchauffement climatique modifie les aires de répartition des espèces qu’elles soient commerciales ou non et influe sur la taille des populations, ce qui a un impact sur le bien être humain “.

L’influence de la hausse des températures sur les animaux et les végétaux est désormais bien documentée, Jonathan Lenoir y avait déjà consacré un article en 2014. Pour garder des conditions de vie optimale, les espèces doivent soit tolérer le changement, soit bouger, soit s’adapter pour éviter l’extinction. Les études scientifiques montrent qu’en moyenne les espèces animales terrestres migrent vers le nord de 17 km par décennie et les espèces marines de 72 km. Les végétaux s’étendent en altitude pour éviter la chaleur des plaines et certaines espèces de poissons optent pour une descente vers les fonds marins. Pour de nombreuses espèces, la réaction reste à la traîne du changement climatique pour des raisons liées au cycle de vie ou aux traits d’histoire de vie des organismes.Toute la chaîne alimentaire est en effet bouleversée. ” Les changements dans les dynamiques de prédation, les associations de végétaux, la compétition et le mutualisme peuvent aussi avoir des impacts substantiels au niveau des populations ” écrivent les auteurs.

Prédateur

 Ce n’est évidemment pas sans conséquence pour un “top prédateur” comme l’homme. Des effets directs sont déjà constatés. Alors qu’il ne faisait jusqu’au début du siècle que l’objet d’une négociation entre pays européens, le stock de maquereau de l’Atlantique est remonté tellement au nord qu’il en est devenu une pêche islandaise, provoquant une dispute entre cette île non membre de l’Union européenne et les membres de celle-ci. En Australie, le recul des kelp, ces immenses forêts de macro-algues et leur remplacement par des herbiers sous-marins, est attribué à la hausse des populations de poissons herbivores tropicaux qui peuvent désormais fréquenter des eaux qui leur étaient auparavant interdites car trop fraîches. Les thons tropicaux dont dépendent les populations de nombreuses petites îles du Pacifique commencent à remonter vers le nord, mettant en péril leur approvisionnement. Dans ce cas, il y a des perdants et des gagnants. Les eaux indiennes les plus septentrionales sont en train de devenir plus productives. Les pays tempérés ne sont pas épargnés. Les chercheurs donnent l’exemple de la forêt européenne dont la productivité notamment en bois d’œuvre est déjà modifiée par la hausse des températures et un climat plus sec.

Les principaux déséquilibres écologiques dans le monde et leurs effets sur les humains (en jaune), les écosystèmes (en vert), les relations internationales (en orange) et les rétroactions climatiques (en bleu). © Science

 

L’article met aussi le doigt sur des effets de rétroaction qui pourraient bien aggraver l’impact direct du changement climatique. Ainsi, les régions arctiques se réchauffent, favorisant l’expansion de buissons qui remplacent petit à petit les étendues de mousses et de lichens de la toundra. Ces végétaux nouveaux consomment certes plus de CO2 pour leur photosynthèse mais ils absorbent également plus de rayonnement solaire et produisent plus de vapeur d’eau, amplifiant ainsi l’augmentation de la température de l’air, qui en Arctique grimpe deux fois plus vite que la moyenne mondiale. L’expansion des buissons provoque alors des réactions en chaîne. La disparition des mousses et lichens prive les rennes de leur pâturage d’hiver. Et les hommes sont affectés par la perte de productivité de leurs troupeaux.

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Source : Science et avenir

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