Réfléchir au-delà de l’auto-solo pour une réelle transition énergétique en transport

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Entrevue avec Louis Beaumier, le directeur exécutif de l’Institut de l’énergie Trottier (IET) qui tenait récemment le 4e Symposium annuel Trottier sur l’ingénierie, l’énergie et la conception durables, sur le thème du transport.

Pourquoi avoir choisi le thème du transport pour ce 4e Symposium annuel Trottier sur l’ingénierie, l’énergie et la conception durables?

Parce que le Québec s’est fixé un objectif ambitieux de réduction d’émission de gaz à effet de serre (GES) et que le transport compte pour 41 % des émissions de la province (voir État de l’énergie au Québec 2017). Il nous apparaissait donc logique d’y consacrer le symposium de cette année. Notre intention était d’amener la réflexion au-delà de la seule question de l’électrification de l’automobile.

Pourquoi cette intention?

Électrifier une voiture ce n’est au final qu’un changement de carburant. En encourageant l’achat de voitures électriques, nous nous attaquons certes aux émissions de GES, cela dit, seulement celles liées à l’utilisation, mais nous restons sur le même modèle de l’auto-solo. Toutes les externalités à ce mode de transport sont ainsi ignorées, comme le coût de la congestion routière (voir le rapport de la Commission de l’écofiscalité du Canada) ou le financement des infrastructures de transport (voir Le Québec économique 6 – le défi des infrastructures).

Il nous semble que la transition énergétique dans le transport doit être plus qu’un simple changement de carburant. Elle doit être l’occasion de revoir notre conception de la mobilité et la place que nous accordons à la voiture individuelle.

Sommes-nous sur la bonne voie pour réussir ce changement de paradigme?

Malheureusement, il semble difficile de renoncer à la voiture individuelle. Notamment parce que, depuis ses tout débuts, l’industrie automobile a très bien su en faire un idéal de liberté (voir la présentation de Peter Norton). Pouvoir circuler n’importe où, n’importe quand et sans entrave, c’est la fausse promesse faite par l’industrie. C’est toutefois une promesse impossible à tenir. Étant dans une logique de liberté, plus je conduis, plus j’exprime ma liberté, mais plus les routes sont congestionnées. Augmenter l’offre n’a toujours fait que créer plus de demande.

Cette même rhétorique de liberté, l’industrie automobile l’appliquera à la voiture autonome. Un rapport de KPMG, The Clockspeed Dilemma, la conforte d’ailleurs dans cette approche. Le rapport prédit une augmentation des distances parcourues et un taux d’occupation pouvant passer sous le seuil de un passager par voiture. Rien ici pour réduire les problèmes de congestion, sans parler de l’augmentation possible de la taille du parc automobile. Libéré de l’obligation de conduire, chaque enfant pourrait avoir sa propre voiture. Envoyer son enfant seul à sa pratique de hockey du samedi matin, n’est-ce pas là une image de liberté exploitable?

La voiture autonome pourrait donc avoir des effets négatifs?

Si par excès d’optimisme nous ne réfléchissons pas maintenant à l’encadrement de son utilisation, c’est très possible. Cependant, il ne faudra pas penser la réglementation qu’en termes de restrictions à l’utilisation, mais aussi comme moyen de favoriser les bénéfices collectifs. Par exemple, obliger un calcul d’itinéraire collaboratif, les choix individuels d’itinéraire menant très souvent à une augmentation des temps de déplacements pour tous.

Au final, ce qu’il faut éviter, c’est que la voiture autonome ne fasse que remplacer l’automobile personnelle et ainsi perpétuer le modèle de l’auto-solo.

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Source : CRE Montréal

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