Low-Tech : innover sans polluer, c’est possible?

0

Par Catherine Paquette

La maison de Patrick et Dominique, à La Baie. Photo : GREB

Tout près d’une maison chauffée à la lumière solaire et isolée du froid grâce à des bottes de foin, un vélo stationnaire permet d’essorer les légumes cueillis à même le potager. L’image semble sortie tout droit d’une autre époque? Pas pour Abrielle Sirois-Cournoyer, selon qui les principes «Low-Tech» qui guident plusieurs éco-villages québécois doivent faire partie de la solution à la crise écologique actuelle.

Aux abords de la Rivière Saguenay, quelques familles ont créé l’Écohameau de La Baie, où les maisons aux matériaux durables et l’efficacité énergétique est remarquable : leurs murs ont été construits selon la technique du GREB, où de la paille est insérée entre les planches de bois pour isoler la structure tant en hiver qu’en été. C’est en visitant plusieurs éco-villages comme celui-là que l’ingénieure Abrielle Sirois-Cournoyer a réalisé l’utilité de certaines basses technologies pour la transition écologique dans laquelle elle est engagée.

«Ce sont des endroits où plusieurs personnes se rassemblent pour créer différemment, vivre en communauté, vivre en autonomie. Ils vont construire des maisons plus respectueuses de l’environnement, vivre de l’agriculture et tout ça de manière autonome, mais sans se déconnecter de la société actuelle », explique-t-elle.

Abrielle Sirois-Cournoyer donne plusieurs conférences à propos du «Low Tech» depuis la fin de sa maîtrise. Photo : Gracieuseté

Alors à la maîtrise, Abrielle a choisi de se pencher sur les possibilités et les manières dont on pourrait employer davantage ces basses technologies, en proposant une définition élargie du concept de «Low-Tech».  L’idée permettait, dit-elle, de « réconcilier l’ingénieure et l’écolo » en elle.

Dans la littérature, les mots low-tech (basse technologie), désignent tantôt un type de technologie, tantôt un courant qui vise à faire contrepoids au monde du high-tech (haute technologie). Tout comme le courant de la décroissance dans lequel le mémoire d’Abrielle s’inscrit, le Low-Tech formule trois critiques vis-à-vis du système actuel : la problématique écologique causée par l’exploitation des ressources, l’injustice associée à l’accès aux hautes technologies, mais aussi liée à la délocalisation et la production de la haute technologie par des populations pauvres, ainsi que la problématique de dépendance qui en découle.

Le Low-Tech, par opposition, a des visées plus humaines. « À la base, un low-tech doit être soutenable, juste, et nous rendre plus autonome, résume Abrielle. Mais j’ai aussi ajouté à ça un 4e critère, qui est l’observation : il faut d’abord remettre en question nos besoins et observer le contexte dans lequel va servir l’outil ou la chose que l’on crée. C’est l’étape de la réflexion et de la remise en question, qui vient avant les étapes de soutenabilité, de justice et d’autonomie », ajoute-t-elle.

C’est lors de sa visite à l’Écohameau de La Baie qu’elle a validé la pertinence de ce 4e critère dans la définition du Low-Tech. «C’est là que j’ai compris l’importance de prendre le temps de réfléchir à nos besoins et d’observer. Par exemple, le design de leurs maisons fait en sorte que c’est le soleil qui va réchauffer l’intérieur. Ils ont vraiment réfléchi à la latitude, la hauteur du soleil et à l’emplacement des fenêtres pour que ça fonctionne même l’hiver. L’hiver le soleil est plus bas dans l’horizon, et l’été il est plus haut. Donc ils ont mis un balcon au deuxième étage, qui fait de l’ombre en été, explique-t-elle.

Vision à grande échelle

Bien que les exemples d’éco-villages mentionnés par l’ingénieure soient tous situés en région, cette dernière est d’avis que le Low-Tech en tant que concept ou philosophie est aussi applicable en milieu urbain.

« C’est sûr que la toilette compost ne peut pas s’appliquer en ville. Mais il faut repenser nos manières de faire. Dans nos prochaines manières de concevoir la ville, il faudrait prendre en compte les critères Low-Tech. Ce n’est pas de dire non à la haute technologie, mais c’est de les faire passer par ce processus-là : se questionner sur nos besoins, se demander si c’est soutenable, accessible, se demander si ça nous rend plus autonome », explique-t-elle.

D’ailleurs, plusieurs projets déjà en place respectent l’idée derrière le Low-Tech, fait-elle remarquer. La bibliothèque d’outils La Remise située à Montréal permet par exemple de « développer nos capacités manuelles » et nous apprendre à fabriquer ou réparer des objets grâce au prêt d’outils. Aussi, certains jardins communautaires montréalais ont installé des mini-serres qui permettent de prolonger les mois de récoltes.

Pour Abrielle Sirois-Cournoyer, le Low-Tech est plus qu’une simple opposition entre haute et basse technologie : « J’ai découvert que c’était plus une philosophie de vie. C’est tout le processus en arrière qui est vraiment important. »

__

Vous trouverez ici une carte de plusieurs Éco-villages en Amérique (en anglais)

 

Partager.

Répondre