Les dernières semaines ont été fertiles en signes encourageants en ce qui concerne le développement d’un marché du carbone au Canada. En effet, ces dernières semaines ont compté plus d’événements encourageants que les douze mois précédents.
Il faut signaler à cet égard six événements importants de nature législative ou administrative qui sont autant de signes annonciateurs de la mise en place d’un ou plusieurs marchés du carbone en Amérique du Nord d’ici 2012.
Ces événements sont les suivants :
- La Chambre des Représentants des États-Unis a adopté le projet de loi H.R.2454 le 26 juin 2009, ce qui constitue le premier projet de loi sur les changements climatiques à être adopté par le Congrès des États-Unis d’Amérique. Ce projet de loi servira de base pour celui que le Sénat élaborera au cours des prochains mois. Il s’agit d’un projet de loi monstre de plus de 1 200 pages établissant un système national de plafonds et d’échanges d’émissions de gaz à effet de serre qui vise à diminuer les émissions américaines des sources principales de GES de 17 % en 2020 et de 83 % en 2050, comparativement aux émissions de 2005. Ce projet de loi reconnaît le recours aux crédits compensatoires. Il permet même d’avoir recours aux allocations d’émissions provenant de l’étranger, telles les allocations du Système européen d’échange de quotas d’émissions.
- Le gouvernement fédéral du Canada a, le 13 juin 2009, publié deux guides visant à préparer l’instauration d’un régime de reconnaissance de crédits compensatoires dans le cadre du Système canadien de crédits compensatoires. Il s’agit des Règles du programme et lignes directrices à l’intention des promoteurs de projet et des Règles du programme de vérification et lignes directrices à l’intention des organismes fournissant des vérifications. Ces documents ont été soumis à la consultation publique jusqu’au 12 août 2009. Il s’agit de deux éléments importants qui permettront l’instauration d’un marché du carbone reconnaissant des crédits compensatoires au Canada.
- Dans le cadre de la Western Climate Initiative (WCI), un Livre blanc sur la définition et les critères d’admissibilité aux crédits compensatoires pour les onze gouvernements des États-Unis et du Canada qui ont adhéré à cette entente intergouvernementale a été publié. Cette initiative s’inscrit dans une démarche qui vise à doter ces onze territoires d’un régime de plafonds et d’échanges d’émissions de GES à compter de 2012.
- Le Québec a adopté la Loi 42 intitulée Loi modifiant la Loi sur la qualité de l’environnement et d’autres dispositions législatives en matière de changements climatiques qui est la première loi québécoise sur les changements climatiques. Sanctionné le 19 juin 2009, le Projet de loi 42 établit les principales règles du régime québécois de contrôle des émissions de GES. Ce régime est fondé sur l’établissement de cibles de réduction de GES pour l’ensemble du Québec et pour différents secteurs d’activité. Des plafonds d’unités d’émission de GES seront fixés par décret pour des secteurs d’activité ou des catégories d’entreprises, d’installations ou d’établissements. Des règlements pourront être adoptés par le gouvernement relativement à l’attribution d’unités d’émission, de crédits compensatoires, de crédits pour réduction hâtive ou d’autres types de droit d’émission. Le projet de loi prévoit un régime qui permet des transactions sur les droits d’émission et assure la comptabilité et la traçabilité des droits d’émission, notamment par la tenue d’un registre public des droits d’émission.
- Le 27 mai 2009, le gouvernement de l’Ontario a déposé le Projet de loi 185 qui vise à introduire dans la Loi sur la protection de l’environnement des dispositions lui permettant d’adopter des règlements pour établir un régime de plafonds et d’échanges d’émissions de GES. Le projet de loi en est présentement à une étape de consultation publique. Il s’agit d’un projet de loi relativement court qui comporte peu de règles ou de principes de base. Il confère essentiellement un vaste pouvoir réglementaire qui permettra au gouvernement d’établir toutes les modalités d’un régime de plafonds et d’échanges d’émissions de GES, y compris la reconnaissance de crédits compensatoires, les crédits pour action rapide, des règles d’allocation des droits d’émission et la production de rapports.
- De même, la Saskatchewan a déposé le 11 mai 2009 son Projet de loi 95 qui vise à réglementer les gaz à effet de serre. Ce projet de loi confère un large pouvoir réglementaire au gouvernement de cette province et prévoit qu’un certain nombre d’entreprises seront réglementées et assujetties à des plafonds d’émissions établis sur une base annuelle. Le projet de loi reconnaît les crédits compensatoires et les crédits pour action hâtive. Si une entreprise omet de réduire ses émissions de GES, elle devra payer une somme fondée sur un prix de conformité carbone qui sera établi par règlement. Les entreprises devront adopter des programmes de réduction des GES et faire rapport au gouvernement. Le projet de loi établit quatre sociétés sans but lucratif pour favoriser la recherche de nouvelles technologies, accorder de l’aide financière aux entreprises réglementées et promouvoir l’éducation de la population en matière de changements climatiques.
Par Me Jean Piette
Avocat spécialisé en Droit de l’environnement
Jean Piette est spécialisé dans le domaine du droit de l’environnement et dans celui de l’élaboration des politiques en matière d’environnement. Il a été le premier avocat québécois à exercer une pratique entièrement consacrée au droit de l’environnement depuis 1972. Associé principal et responsable de l’équipe de droit de l’environnement au cabinet d’avocats Ogilvy Renault, il s’est vu attribuer le classement le plus élevé dans le répertoire juridique Martindale-Hubbel, soit la cote AV, pour son respect des normes d’éthique et pour ses qualités professionnelles. Il a été désigné parmi les meilleurs avocats en droit de l’environnement au Canada dans l’annuaire Lexpert/American Lawyer Media et parmi les meilleurs au monde selon le Guide to the World’s Leading Environment Lawyers et le Who’s Who Legal Environment.
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