Par Alexandra Nadeau
Mots-clés : smart grid, technologies vertes, Hydro-Québec, Boulder
Le système de «smart grid» semble être l’ultime outil pour rentabiliser et instaurer définitivement les énergies vertes dans les villes. Dépendantes pour la plupart de la météo, ces énergies sont intermittentes et leur période d’offre ne répond pas nécessairement à la période de demande des consommateurs. Par exemple, sans vent, l’éolienne perd de son efficacité, et le moment où le soleil est à son zénith n’est pas le moment charnière de consommation d’énergie dans une journée. Selon Tino Zottola, bachelier, maître en Génie électrique de l’Université Concordia et passionné par le développement des technologies vertes, l’utilisation des «smart grids» répondrait à ces failles. Le concept de «smart grid», traduit par l’appellation «réseau de distribution intelligent d’électricité» en français, consiste à établir une communication entre diverses sources d’énergies, de manière à les mettre en relation pour les gérer et en assurer un flux continu. Ces réseaux misent sur les énergies conventionnelles (pétrole, gaz naturel, charbon, énergie nucléaire), mais avant tout sur les énergies alternatives (éolien, solaire, géothermie, hydroélectricité). «Les ‘’smart grids’’, c’est Edison qui rencontre Bell», dit M. Zottola.
Une innovation utileLes «smart grids» proposent des solutions aux défis posés par les énergies durables. En s’adaptant instantanément aux conditions de la météo et en ayant la capacité de rediriger les surplus créés, les réseaux intelligents gèrent adéquatement l’offre des diverses sources d’électricité. Ils permettent également une décentralisation de la production d’énergie en intégrant au système des plus petits producteurs pouvant fournir de l’électricité. Du point de vue des consommateurs, ces réseaux peuvent collecter les données d’utilisation d’électricité d’une maison ou d’un quartier et atténuer les heures de pointes en nivelant la demande au courant de la journée. Par exemple, divers appareils peuvent être programmés à des moments stratégiques où la consommation d’électricité est moindre. Autant les entreprises que les individus peuvent y trouver leur compte, car un marché à prix variable de l’électricité existe. Le consommateur aurait le choix du type d’énergie qu’il veut utiliser, de l’entreprise à laquelle il veut l’acheter, et du moment auquel il veut acheter en fonction des prix établis par l’offre et la demande. Il est même possible de voir émerger des crédits d’électricité si un individu a accumulé de l’énergie et veut la revendre à prix intéressant. Évidemment, ces derniers scénarios semblent émerger de la science fiction, mais ils démontrent tout de même la portée qu’un tel système pourrait avoir.
Boulder, la ville «smart grids»La ville de Boulder, près de Denver dans l’état du Colorado aux États-Unis, est une des pionnières dans l’avancée de la technologie «Smart Grids», depuis 2009. Reconnue pour sa constante façon de se démarquer dans le domaine de l’environnement, Boulder a été déclarée la première «Smart grid city» au monde et est la preuve que le système intelligent est un projet réalisable. Cette démarcation technologique a pour but de permettre aux quelques 100 000 citoyens de Boulder d’avoir davantage de contrôle sur leur consommation d’énergie, et les coûts d’énergie varient selon les périodes de pointe. D’autres villes aux États-Unis ont aussi instauré les «smart grids», tel que Austin au Texas, Duke Energy et des villes dans l’État de l’Illinois.
Plus près de chez nousÀ Montréal, rien de telle envergure n’existe, mais Hydro-Québec mène quelques projets tentant d’implanter des réseaux intelligents. Comme on le lit sur leur site internet, «nous sommes au coeur de la définition du réseau futur d'Hydro-Québec. Notre personnel collabore avec les divisions d'Hydro-Québecet des partenaires de l'industrie, des universités et différents organismes pour faire progresser le réseau actuel vers un réseau de plus en plus intelligent.» Trois projets apparaissent sur leur site, dont un ayant pour titre «Maintenance intelligente de réseaux électriques». Dans l’optique des réseaux intelligents, ce projet consiste à repérer les bris sur les lignes électriques et à rétablir les erreurs à l’aide d’un logiciel intelligent. Bien que nous sommes loin des réalisations de la ville de Boulder, les projets d’Hydro-Québec sont tout de même des prototypes intéressants. Selon M. Zottola, le système de distribution intelligent d’électricité est réalisable à Montréal.
Un système complexeBien que les «smart grids» semblent être l’idéal des systèmes de gestion d’énergie, leur implantation peut s’avérer un réel casse-tête. Avec des dizaines de millions de données à gérer au niveau national et de nouvelles fonctions à gérer à la maison, le réseau n’est pas assez intelligent pour s’autoréguler. Des individus doivent organiser le flux de beaucoup d’informations. L’avènement d’un tel système nécessite un investissement important qui est sans doute rentable au bout du compte, mais lorsqu’il s’agit de faire bouger les choses, la situation se complexifie. D’autres jugent que le concept s’attaque à la vie privée en ayant accès à autant d’informations sur les habitudes de consommation des ménages. Certains œuvrant dans les énergies conventionnelles voient les «smart grids» comme des rivales et des potentiels réducteurs de profits en raison de leur préférence envers les énergies propres. Une chose semble évidente, c’est que ces réseaux intelligents de distribution d’électricité sont une technologie plus réalistement applicable dans les pays développés que dans les pas du tiers-monde où on cuisine encore souvent au bois et que l’électricité est davantage un luxe qu’une réalité. Tout compte fait, les «smart grids» semblent être la phase deux du développement des énergies durables. Sans écarter ce projet fort intéressant ayant son lot d’avantages comme le respect de l’environnement, il ne faut pas oublier qu’avant de mettre un tel système en place, le développement des énergies vertes demeure la base du projet. (Avant que le Québec devienne une province implantant les réseaux intelligents, ses choix en matière de développement énergétique devront être intelligents.)
Source: GaïaPresse |