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La ministre des Ressources naturelles du Québec, madame Martine Ouellette, a confirmé hier l’octroi d’un bloc additionnel de 450 MW d’énergie éolienne, dont 300 MW devront obligatoirement être produits dans les régions du Bas St-Laurent et de la Gaspésie- Iles de la Madeleine, les autres 150 MW pouvant être produits ailleurs au Québec.
À compter de leur date de mise en service (225 MW au 1er décembre 2017 et 225 MW au 1er décembre 2018), ces 450 MW (puissance)produiront annuellement une quantité additionnelle d’énergie de 1,3 TWh (térawattheures).
Calcul : 450 MW x 8760 heures = 3,942 TWh (100 %)
et
3,942 TWh x facteur d’utilisation (F.U.) de 33 % = 1,301 TWh
Cette énergie additionnelle devra être achetée par Hydro-Québec dans ses activités de Distribution, à un prix maximum de 9,5 ₵ / KWh (soit 95 M$ / TWh) indexé au taux d’inflation annuel pour la durée des contrats d’achat (habituellement d’une durée minimale de 20 ans).
Il s’agit donc d’engagements d’achats post patrimoniaux effectués par la division Distribution d’Hydro-Québec pour combler, auprès de producteurs privés, la portion des besoins québécois en énergie excédant le volume (fixe)d’électricité patrimoniale de 165 TWh (178,9 TWh incluant les pertes de T et de D)fourni annuellement par sa division Production. Ces engagements d’achats ont été imposés à la société d’État par des décrets ministériels, adoptés pour la plupart entre 2003 et 2012. Le bloc éolien additionnel de 450 MW découle d’un projet de Règlement publié dans la Gazette officielle du Québec du 28 août 2013 et qui prévoit que le « Distributeur » (HQD) doit procéder à un appel d’offres dans les 90 jours suivant cette date.
Rappelons que l’octroi de ce bloc additionnel de 450 MW survient dans un contexte de surplus d’énergie importants de la division Distribution, ses engagements d’achats à long terme excédant déjà les besoins en énergie québécois des prochaines années par une marge considérable (vraisemblablement, au moins jusqu’en 2027). L’effondrement de la demande du secteur industriel, amorcée avant la crise financière de 2008-2009 et qui se poursuit, en est la principale cause. Notons également que la stagnation des secteurs manufacturiers et institutionnels est aussi venue accentuer le ralentissement de l’activité économique québécoise lors des deux premiers trimestres de l’année 2013.
La division Distribution d’Hydro-Québec (HQD)vient d’ailleurs de réviser ses prévisions des besoins québécois, toujours à la baisse, pour une dixième année consécutive (voir la demande tarifaire de HQD, dossier R-3854-2013 de la Régie de l’énergie, pièce B-0011, HQD-3 doc 2). Pour l’année 2014 à elle seule, HQD aura des surplus de 13,4 TWh (excédent des approvisionnements engagés par rapport aux besoins des clients québécois). Pour les sept dernières années de la présente décennie (2014-2020), les surplus d’approvisionnements d’Hydro-Québec Distribution occasionneront des pertes financières d’environ 600 M$ / an, soit environ 4,2 G$ cumulativement. Ces coûts d’approvisionnement inutilement engagés devront être épongés par les tarifs des clients québécois, tel que le prévoit la Loi(LRÉ).
Pour ce qui est du bloc éolien de 450 MW annoncé par l’actuel gouvernement, il occasionnera à compter de 2018 des coûts d’achat additionnels de 123,5 M$ / an (1,3 TWh @ 95 M$ / TWh), indexés à l’inflation pendant 20 ans, dont des pertes financières additionnelles de 71,5 M$ / an (1,3 TWh acquis @ 9,5 ₵ / KWh et revendu (puisqu’en surplus) @ 4 ₵ / KWh)… également récupérées dans les tarifs d’électricité de la collectivité.
Contrairement à ce qui est fréquemment affirmé, les achats post patrimoniaux imposés à HQD par le(s) gouvernement(s) du Québec ne donnent lieu à aucune « création* » de richesse. Ils constituent plutôt un transfert massif de richesse collective vers une nouvelle industrie privée de la production d’électricité, subventionnée à même les tarifs d’électricité des québécois. Pour les décennies 2011-2020 et 2021-2030, la division Distribution d’Hydro-Québec a, jusqu’à présent, pris des engagements d’achats à long terme auprès de producteurs privés d’une valeur cumulative d’environ 40 G$.
Dans la mesure où une proportion importante de ces approvisionnements seront inutiles et ne pourront qu’être revendus à perte, il y a plutôt lieu de parler de destruction de richesse et d’appauvrissement collectif.
Source: Jean-François Blain, analyste, secteur de l’énergie