Le sommet du Climate week se déroulant à New York aidant, nous avons vu plus de 125 leaders internationaux admettre l’importance de la question. Est-ce qu’il y aura de réelles répercussions à cette rencontre? Cela reste à voir. Bien que l’on peut rester dubitatif devant certaines propositions qui sont peu ou pas contraignantes proposées dans ce type de rencontres, il reste qu’elles représentent des moments charnières dans l’élaboration d’une stratégie internationale pour la lutte contre les changements climatiques.
C’est pourtant sans trop de surprise que nous apprenions la semaine dernière que le premier ministre Harper, lui, ne daignerait même pas se présenter. Par contre, ce qui a été plutôt étonnant, voire surréaliste, ce sont les raisons invoquées pour justifier son absence. On peut comprendre que le premier ministre ait un horaire chargé, tout comme nous pouvons imaginer celui des États-Unis pourtant présents. Mais M. Harper a osé affirmer publiquement que la conférence ne méritait pas qu’il y porte attention parce que le Canada est déjà un leader en matière de lutte au bouleversement climatique. Avouez que ça décoiffe … C’est loufoque. Inquiétant. Embarrassant. Malheureusement peu étonnant.
Considérant qu’Ottawa ne s’enligne pas pour atteindre les cibles qu’il s’est lui-même fixé après son retrait de Kyoto et que l’on peut s’attendre à ce que la production de pétrole sur le territoire puisse tripler d’ici 2050 sur le territoire, cette déclaration est tout simplement absurde.
Kyoto trop difficile
Lorsque le Canada a signé en 1997 le protocole de Kyoto, il s’engageait à ramener en 2012 ses émissions de gaz à effet de serre (GES) à 6% sous les niveaux de 1990. Si le Canada ne s’était pas retiré de Kyoto, son résultat serait tout simplement embarrassant : une hausse de 18,3 %.
Lors de son retrait, le Canada change complètement ses objectifs et propose une cible bien plus facile à atteindre : une réduction de 17% en 2020 par rapport aux émissions de 2005. Comme les émissions de 2005 sont bien plus importantes que celles de 1996, les résultats devraient être beaucoup plus facilement atteignables. Pourtant, l’atteinte de ses objectifs reste incertaine. Entre 2005 et 2011, les émissions ont diminué de 4,8% en 6 ans. Ce qui laisse une diminution de 12, 2% à atteindre entre 2011 et 2017. Il y’a donc peu d’espoir pour la suite, comme le démontre le graphique suivant :
Émissions historiques de gaz à effet de serre du Canada et projections jusqu’en 2020
Sources : Environnement Canada (2013) Tendances en matière d’émissions au Canada 2013.
Fait à noter : les courbes de tendances sont basées sur les données d’augmentation de l’exploitation pétrolière approuvée par l’Office national de l’Énergie (ONE) et non celles espérées par l’industrie.
Ces faibles résultats s’expliquent principalement par le choix du gouvernement de concentrer ses efforts dans la diminution des émissions de GES provenant du transport. Il s’agit d’une volonté louable, mais un peu futile si le gouvernement ne fait aucun effort pour diminuer les émissions provenant de l’industrie pétrolière.
Or, comme le montre le graphique suivant, les impacts de l’exploitation pétrolière vont assurément supplanter les efforts dans la diminution des émissions de GES dans le transport.
Tendance des émissions de GES par secteur, Canada, Mt éq. CO2, 1990-2020 (1990 = 100)
Sources : Environnement Canada 2013a (CNUCC partie 1 p. 51), Environnement Canada 2013b (CNUCC partie 3 p. 42), Environnement Canada 2011.
Bref, le Canada fait figure de cancre bien plus que de leader. Ses réductions d’émission de GES et les stratégies qu’il emploie sont loin d’être suffisantes pour ne pas continuer à être considéré comme un « État voyou » sur le plan environnemental.
Personne n’est dupe. Il est clair que Harper ne souhaite pas discuter du climat puisque le choix de son administration de miser sur l’extractivisme sont contraires aux objectifs environnementaux. Refuser de faire face à la musique et de rencontrer les autres leaders et journalistes alors que la situation est de plus enplus critique relève de la couardise plutôt que du leadership.
Source: Par Bertrand Schepper, IRIS