Selon le calendrier avancé par le gouvernement Couillard, la Commission de révision permanente des programmes devrait lui remettre sa première série de recommendations sous peu. Au sein du mouvement d’action communautaire autonome (ACA), l’inquiétude est palpable. Les rumeurs et les multiples ballons médiatiques n’ont rien fait pour calmer les esprits et tous s’attendent au pire: des coupures tous azimuts légitimées par l’obession gouvernementale d’en arriver à un déficit zéro à très court terme auront un impact majeur sur les organismes d’ACA.
Le premier ministre Couillard a beau tempérer les visées de certains de ses ministres, comme ce fut le cas la semaine dernière avec Carlos Leitao (qui voyait dans les organismes communautaires un moyen de sous-traiter à rabais une partie de sa mission sociale et ainsi obtenir des économies d’échelle), la clameur est trop persistante pour qu’il réussisse à rassurer les organismes d’ACA. Surtout lorsque le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, répète à qui veut l’entendre que le principal objectif de l’austérité est de « repositionner l’État québécois », c’est-à-dire réduire drastiquement et à tout prix la taille et le rôle de l’État, pour des questions idéologiques qui estiment que la richesse ne peut être créée que par l’entreprise privée.
Depuis sa fondation au milieu des années 1990, le Réseau québécois de l’action communautaire autonome (RQ-ACA) s’est toujours positionné très clairement contre toute tentative du gouvernement de se décharger de sa mission sociale par la sous-traitance et le bénévolat. Farouches défenseurs de leur autonomie, même si une partie de leur financement est de source gouvernementale, les organismes d’ACA obtenaient gain de cause sur ce point en 2001. Le gouvernement inscrivait dans sa première Politique gouvernementale en matière d’action communautaire l’importance du respect de l’autonomie des organismes d’action communautaire autonome.
Il est facile de comprendre toute l’inquiétude vécue actuellement par les organismes: la Commission de révision de programmes pourrait en profiter pour remettre en question l’existence même de ces différentes ententes entre le gouvernement et les organismes d’ACA ou, du moins, qu’elle recommande d’en changer profondément leur nature, remettant ainsi en question les fragiles acquis du mouvement d’ACA. D’autant plus que la dite Politique n’est aujourd’hui que partiellement appliquée, voire pas du tout, dans bon nombre de ministères[1].
Le gouvernement Couillard ne doit donc pas s’attendre à la collaboration des organismes d’ACA dans l’exercice visant à leur transférer des services que le privé ne voudrait pas offrir car non rentables. Ce serait une atteinte directe à l’autonomie des 4000 organismes qui interviennent sur un large éventail de problématiques et d’enjeux sociaux présents dans des domaines très variés : santé et services sociaux, loisirs, logement, environnement, enfance, vieillesses, chômage, aide sociale, médias communautaires, LGBT, etc.
Si le gouvernement est sérieux dans ses objectifs de faire des économies et de réduire la dette, d’autres voies que l’austérité sont possibles. Dans un souci de préserver son rôle social et son offre actuelle de services, le gouvernement Couillard pourrait mettre en place des mesures semblables à celles proposées par la Coalition contre la tarification et la privatisation des services publics qui permettraient de dégager 10 milliard$[2] pour préserver le modèle québécois.
Le RQ-ACA en appelle donc les 4000 organismes d’ACA, ainsi que la population en général, à s’opposer fermement aux orientations actuelles du gouvernement libéral de Philippe Couillard. Ensemble, nous pouvons lutter plus une société plus équitable et plus juste.