La Fondation Rivières et Nature Québec demandent au premier ministre Couillard de respecter la principale recommandation du BAPE et de surseoir à la décision de construire une nouvelle ligne de transport électrique à 735 kV au coût de 1350 milliards de dollars joignant Chamouchouane au Lac-Saint-Jean à l’Île de Montréal. « Une solution alternative existe. Appelée la compensation en série, elle permettrait, par l’ajout d’équipements sur les lignes existantes, d’éviter la construction d’une nouvelle ligne avec tous les impacts sociaux et environnementaux que cela implique. On demande au gouvernement de prendre le temps de bien faire les choses », a déclaré Christian Simard, directeur général de Nature Québec.
Dans son rapport remis le 9 mars dernier, la Commission du BAPE recommande au gouvernement de prendre une « pause […] le temps que l’information supplémentaire soit acquise, d’autant plus que le promoteur dispose d’une marge de manœuvre. » Une solution intéressante à étudier consiste à remplacer des lignes existantes qui occasionnent des pertes énergétiques et à en augmenter la puissance, un projet qui s’avérerait tout aussi créateur d'emplois.
Selon le rapport de la Commission du BAPE, signé par Michel Germain, le scénario de la compensation en série entraîne « nettement moins d’impacts humains et écologiques que la ligne projetée, puisque l’équipement requis serait installé sur des lignes ou dans des postes existants. » La Commission conclut logiquement « qu'une évaluation comparative des deux solutions sur les plans humain, écologique et économique devrait être demandée à Hydro-Québec avant la prise de décision gouvernementale. Cette évaluation devrait être rendue publique. »
Face à cette conclusion, Nature Québec et Fondation Rivières ne comprennent pas l’empressement du premier ministre Couillard, qui doit présenter un projet de décret demain au Conseil des ministres, d’aller de l’avant avec un projet qui aurait de graves impacts sur l’environnement et les milieux de vie sans même attendre l’examen du projet alternatif. « On se demande ce qui se cache derrière cette fausse urgence, Hydro-Québec possédant toute la marge de manœuvre nécessaire pour qu’on examine en profondeur un plan B à moindre impact; d’autant plus qu’Hydro-Québec n’a aucunement prévu de compenser tous les dommages causés notamment par les pertes économiques pour tous les citoyens et commerçants qui résident à proximité des lignes prévues », soutient pour sa part Geneviève Marquis au nom de la Fondation Rivières.
Contourner le BAPE ou faire fi de ses recommandations : une nouvelle tendance?
Les deux organisations environnementales s’inquiètent de la tendance récente du gouvernement Couillard à court-circuiter ou faire fi des principales recommandations du BAPE dans des projets d’envergure : qu’on pense au projet de cimenterie à port-Daniel où le gouvernement a déposé un projet de loi spéciale pour s’assurer qu’aucun examen public par le BAPE ne soit possible et ainsi invalider à l’avance un éventuel désaveu par les tribunaux; ou à la décision récente d’aller de l’avant avec le projet de Mine Arnaud même si le BAPE le jugeait « inacceptable dans sa forme actuelle ».
La décision de rejeter du revers de la main la conclusion centrale du rapport du BAPE sur la ligne Chamouchouane est d’autant plus étonnante que la Commission du BAPE était présidée par un commissaire d’expérience, Michel Germain, rompu à ce type d’examens. Le site du BAPE indique que ce commissaire, nommé par un gouvernement libéral, « a agi à titre de commissaire à huit reprises et a présidé quatorze commissions d’enquête et d’audience publique ».
Les impacts sociaux et humains occasionnés par la construction d’une ligne à 735 kV supplémentaire dans les régions de Lanaudière et des Laurentides ont fait partie des préoccupations fréquemment rapportées devant le BAPE au regard des activités agricoles, du paysage, de la villégiature, des effets des champs électriques et magnétiques, de la qualité de vie des résidents et des activités économiques existantes à proximité de l’emprise projetée. La préservation des milieux forestiers et des activités qui y ont cours a également été fréquemment invoquée en raison du déboisement nécessaire dans l’emprise de la ligne projetée.
Source: Nature Québec